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À quoi ressemble l’obligation vaccinale sur les campus?

Doit-on obliger la vaccination : la question dont a débattu le milieu universitaire est maintenant mise à l’épreuve.

par EMILY BARON CADLOFF | 20 SEP 21

Cet automne, un choix s’impose aux étudiants et au personnel qui se présentent sur le campus de l’Université de la Saskatchewan : fournir la preuve qu’ils sont doublement vaccinés contre la COVID-19 ou se soumettre à des tests de dépistage rapide deux fois par semaine. Cette politique ne rend pas obligatoire la vaccination, mais il s’agit de la mesure jugée la plus acceptable par l’établissement, selon son recteur, Peter Stoicheff.

Lorsque M. Stoicheff et les autres dirigeants de l’Université ont pris cette décision pendant l’été, la Saskatchewan affichait un des plus faibles taux de vaccination au pays. Il était impensable d’accueillir sur le campus près de 30 000 étudiants, employés et membres du corps professoral sans se doter d’une politique sur la vaccination. L’Université de la Saskatchewan, à Saskatoon, réunit chaque jour une « foule comparable à celle du Mosaic Stadium pendant un match des Roughriders, mais à l’intérieur, affirme M. Stoicheff. Il s’agit probablement de la plus grande concentration de gens dans la plus petite zone de la province ».

Tout comme M. Stoicheff, les dirigeants d’établissements de partout au pays ont pesé le pour et le contre de l’obligation vaccinale. Plutôt que de convenir d’une politique uniforme, chaque établissement a élaboré la sienne en consultation avec les autorités sanitaires fédérales et provinciales.

À l’Université Simon Fraser, à Burnaby, en Colombie-Britannique, une preuve de vaccination est requise pour accéder entre autres aux résidences étudiantes, mais ne l’est pas pour l’accès au campus en général. L’Université McGill a jugé qu’elle ne pouvait imposer la vaccination, à moins qu’elle soit obligatoire à l’échelle provinciale. Toutefois, le port du masque est obligatoire à l’Université McGill, comme dans toutes les autres universités au Québec, conformément aux directives provinciales. Pour ce qui est de la distanciation, elle est obligatoire dans certains lieux, mais pas dans les salles de classe. L’Université du Manitoba exige que tous soient entièrement vaccinés, à moins d’avoir une exemption pour raisons médicales.

À l’Université du Yukon, on n’a pas senti le besoin de rendre la vaccination obligatoire puisque le territoire présente des taux d’infection bien inférieurs à ceux d’ailleurs au pays. L’établissement entend continuer de miser sur le dépistage et d’imposer le port du masque, ce qui représente un juste équilibre, selon Janet Welch, vice-rectrice à l’enseignement et provost. L’Université a aussi envisagé le recours aux tests de dépistage rapide, mais elle s’est butée à des problèmes d’approvisionnement et tente de trouver une solution avec la médecin hygiéniste en chef du territoire.

Quelle est donc la voie à suivre? Comme les politiques varient grandement d’un établissement à l’autre, vaut-il même la peine de se poser la question? Selon les épidémiologistes, toute politique vaccinale, même si elle ne réglera pas tous les problèmes, est préférable à l’absence de politique.

« Si, d’après la propagation communautaire, la province a décidé qu’il fallait un [passeport vaccinal] pour manger dans les restaurants et qu’un maximum de six personnes pouvait partager la même table lors d’activités sociales, pourquoi ne pas mettre en place les mêmes mesures pour protéger les étudiants qui se réunissent par dizaines ou centaines dans les amphithéâtres? », demande Kelly McNagny, immunologiste et professeur à l’Université de la Colombie-Britannique. Selon ce dernier, en encourageant les étudiants à se faire vacciner, nous renforçons leur protection individuelle, mais aussi celle de toutes les personnes avec lesquelles ils sont en contact, y compris les gens immunodéficients qui demeurent vulnérables malgré la vaccination.

Imposer la vaccination est peut-être l’un des meilleurs moyens de restreindre la propagation du virus, mais la loi permet-elle aux universités de recueillir des renseignements sur le statut vaccinal? Selon Timothy Caulfield, titulaire de la chaire de recherche du Canada en droit et politique de la santé à l’Université de l’Alberta, les arguments fondés sur la protection de la vie privée ne seraient probablement pas recevables devant un tribunal. Tant que les universités offrent des solutions de rechange convenables aux personnes ayant une exemption pour raisons médicales, elles ne feront face à aucun obstacle juridique si elles envisagent l’obligation vaccinale.

Même si les médias sociaux semblent indiquer le contraire, M. Caulfield affirme que la demande de preuve de vaccination n’entrave pas la protection des renseignements personnels. Les établissements recueillent des renseignements précis et peu nombreux, souligne M. Caulfield. Les affirmations sur l’atteinte à la vie privée ne sont que des « propos alarmistes ».

De la même façon, interdire aux personnes non vaccinées de réaliser certaines activités ou d’accéder à des lieux n’est pas discriminatoire d’après M. Caulfield. « [Le fait d’être vacciné ou non] n’est pas une caractéristique immuable, explique-t-il. Et les décisions ont des conséquences. L’objectif consiste en quelque sorte à distinguer les personnes vaccinées de celles qui ne le sont pas. »

Selon de nombreux experts, la question n’est pas de déterminer s’il faut ou non rendre la vaccination obligatoire, mais plutôt quelle preuve accepter et quelles pénalités imposer en cas de non-respect des consignes? Colin Furness, épidémiologiste en prévention des infections et professeur à l’Université de Toronto, craint que certains mentent ou trouvent des failles à exploiter dans la politique. « Très peu de gens tenteront de contourner les règles, mais c’est déjà trop, puisque nous avons affaire à une maladie infectieuse », déclare M. Furness. Celui-ci s’inquiète particulièrement de la falsification des documents de vaccination, ce qui peut être facile à réaliser dans certains cas.

Certaines universités exigent une preuve vaccinale, généralement le document délivré par la province. D’autres acceptent simplement une déclaration et ne demandent pas au personnel et aux étudiants de fournir une preuve de vaccination. Cette situation préoccupe M. Furness. « Quelles sont les conséquences pour les personnes qui mentent? J’aimerais que [les universités] considèrent cela comme une mise en danger d’autrui ou quelque chose d’aussi grave. »

Qu’il s’agisse de vaccination obligatoire, de politique, de lignes directrices ou autres, tous les moyens sont utiles selon de nombreux experts. Ces derniers craignent toutefois que l’obligation vaccinale ne suffise pas à freiner la propagation de la COVID-19.

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