Comment les professeurs évaluent-ils leurs étudiants en confinement ?
Des examens à livre ouvert aux outils de surveillance assistés par intelligence artificielle (IA), les examens finaux prennent différentes formes cette session.
Puisque les restrictions liées à la COVID-19 empêchent la tenue d’examens en personne pour le trimestre en cours, les professeurs et les établissements ont dû trouver rapidement une variété de méthodes de rechange, y compris des technologies de surveillance à distance des examens que bon nombre d’entre eux envisagent pour la première fois.
Cyprien Lomas est vice-doyen des technologies d’apprentissage et directeur du Centre d’apprentissage de la Faculté des systèmes d’agriculture et d’alimentation de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC). À la fin de mars, le Centre a organisé une table ronde en ligne avec des membres du corps professoral pour discuter des alternatives aux examens finaux en personne. « Nous nous sommes demandé comment nous allions y arriver, explique M. Lomas, et comment nous allions poursuivre les activités prévues avec les outils mis à notre disposition. »
« Nous avions alors trois options : les examens en ligne, les examens à domicile et d’autres formes d’évaluation, comme annuler les examens ou changer la pondération des évaluations. » Le personnel du Centre voulait aider les professeurs à choisir une option qui leur convenait, ajoute-t-il, mais aussi à définir des attentes réalistes. « Nous essayions de collaborer avec eux pour trouver des méthodes adaptées à leur réalité. »
Bien que les professeurs de sa faculté aient choisi un éventail de stratégies d’évaluation, M. Lomas dit qu’ils sont nombreux à avoir opté pour des examens en ligne dont la surveillance est assistée par un outil d’IA. Une démarche semblable a été adoptée dans d’autres facultés de l’établissement : de nombreux professeurs ont remplacé les examens finaux par des évaluations à domicile ou à livre ouvert, selon Matthew Ramsey de l’équipe des relations avec les médias. Malgré tout, près de 10 000 étudiants (sur un total de plus de 60 000) feront quand même un examen dont la surveillance se fera à distance.
L’UBC utilise les plateformes assistées par IA Proctorio et ExamSoft qui étaient déjà utilisées avant la COVID-19 pour effectuer la surveillance à distance, ainsi que Zoom pour effectuer la surveillance « en direct ». Un outil d’IA similaire a été offert aux établissements de l’Ontario. En partenariat avec le gouvernement provincial, eCampusOntario donne accès à Proctortrack, une plateforme de surveillance assistée par IA.
« Il existe de nombreuses façons d’évaluer la compréhension des notions abordées en classe », affirme Steven Murphy, coprésident du conseil d’administration d’eCampusOntario. Pour les programmes accrédités par des organismes externes ou soumis à des processus d’admission particuliers, M. Murphy explique qu’un examen officiel en ligne est parfois nécessaire. « Proctortrack vise à répondre à ce besoin. »
Même s’il existe des différences entre les logiciels de surveillance, ils ont habituellement certains points en commun. Ils fonctionnent souvent avec un système de gestion de l’apprentissage existant. Une caméra Web est utilisée pour surveiller et enregistrer les étudiants en examen, tandis que le programme d’IA signale les écarts de conduite potentiels. Un professeur ou un assistant à l’enseignement peut ensuite visionner la vidéo pour voir l’activité suspecte et résoudre tout problème. Selon M. Murphy : « Étant donné que toutes les données de surveillance sont évaluées par des professeurs, ce sont encore eux qui ont le dernier mot sur l’intégrité universitaire. »
Les outils de surveillance soulèvent néanmoins des préoccupations. Certains outils « peuvent être plutôt invasifs » selon M. Lomas, qui indique qu’en plus de l’usage d’une caméra Web, ils comportent des exigences matérielles et logicielles particulières. « Nous avons peu de contrôle sur les logiciels et le matériel des utilisateurs finaux », explique M. Lomas. Des éléments aussi simples qu’une mauvaise version du navigateur peuvent causer des problèmes avec le logiciel de surveillance. Il ajoute qu’on ne tient souvent pas compte du lieu où l’étudiant passe l’examen. « Nous obligeons l’étudiant à effectuer l’examen chez lui, dans des conditions parfois difficiles. Il partage peut-être ce lieu avec quatre ou cinq personnes. Il se peut que l’endroit ne soit pas propice à la tenue d’un examen. »
Anne-Marie Scott, provost adjointe aux activités universitaires de l’Université Athabasca, un établissement d’apprentissage à distance, affirme que le fait de faire superviser les examens par un être humain peut remédier à certains de ces problèmes. « Nos étudiants ne sont pas fondamentalement malhonnêtes. Certaines interruptions pendant les examens ne peuvent pas être évitées; le besoin d’aller aux toilettes, ou l’entrée de quelqu’un dans la pièce. Lorsqu’un être humain surveille les examens, il peut faire preuve de compassion en gérant ces interruptions. »
Depuis 2016, l’Université Athabasca offre à ses étudiants ProctorU, un outil de surveillance à distance par un être humain. La différence, affirme Mme Scott, réside dans le fait que cet outil est maintenant utilisé par une majorité de personnes. Elle indique qu’il nécessite l’intervention « d’un être humain qui parle aux étudiants, les aide à organiser leur environnement et veille à ce qu’ils puissent accéder à l’examen et le commencer. Il leur offre aussi du soutien pendant l’examen. Nous croyons qu’il s’agit d’un facteur incroyablement important pour gérer le stress chez les étudiants. »
Certaines universités, dont l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard, ont décidé de ne pas donner d’examens surveillés à distance pour la session en cours. Katherine Gottschall-Pass, vice-rectrice par intérim à l’enseignement et à la recherche de l’Université, explique que la fiabilité d’Internet a joué dans la décision de son établissement. « Certains de nos étudiants habitent dans les régions rurales de l’Île-du-Prince-Édouard, et d’autres sont retournés dans leur pays, où ils n’ont pas nécessairement le même accès à Internet. » L’Université a donc plutôt incité les professeurs à utiliser Moodle, sa plateforme actuelle de gestion des cours, ou une autre méthode d’évaluation. Les réactions sont positives selon Mme Gottschall-Pass. « Certains professeurs ont vraiment été inspirés par cette situation; les gens essaient de nouvelles choses et font preuve de créativité. »
M. Lomas abonde dans le même sens. « De toute ma carrière, je n’ai jamais eu autant d’énergie qu’au cours du dernier mois, mentionne-t-il. Je ne sais pas si c’est à cause du choc ou de la charge de travail, mais je peux maintenant imaginer et explorer des pistes qui m’ont toujours semblé intéressantes. On a l’impression qu’un million d’expériences sont menées en parallèle, en enseignement supérieur, dans les espaces de conférence, dans les milieux d’apprentissage et même auprès des enfants. »
Postes vedettes
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
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