Cet article est un sommaire de l’article « How the medical school admissions process is skewed ».

En tant qu’universitaire dont un fils fréquente une école canadienne de médecine, j’ai récemment constaté certaines dérives du processus d’admission à ce type d’établissement. Les étudiants que côtoie mon fils ont dû faire preuve de beaucoup d’ingéniosité et d’initiative pour être admis à l’école de médecine : mettre sur pied des organismes d’aide internationale, pratiquer le sport à l’échelle nationale, remporter des prix universitaires prestigieux, publier abondamment, etc. Le simple fait qu’ils aient dû déployer tant d’efforts illustre une réalité dérangeante : le processus d’admission en médecine favorise les étudiants nantis. Pour les candidats qui doivent travailler chez McDonald’s afin de joindre les deux bouts, être astreints à des quarts de travail n’est pas l’idéal pour obtenir des résultats scolaires exceptionnels.

L’attachement des écoles de médecine aux évaluations globales est peut-être ce qui désavantage le plus les étudiants tenus de travailler.

Comme la plupart des écoles de médecine, celle de l’Université de Toronto privilégie les candidats qui s’investissent dans l’action communautaire. Elle est attentive aux capacités de leadership démontrées et aux parcours scolaires remarquables, y compris aux publications. Il est bien plus facile de se consacrer à l’action communautaire ou au leadership quand on n’a pas à travailler pour payer son loyer.

Au Canada, la dernière étude du profil socioéconomique des étudiants inscrits en médecine remonte à plus d’une décennie. Menée par Irfan Dhalla et ses collaborateurs, l’étude a montré que ces étudiants prove-naient majoritairement de familles privilégiées (voir « Characteristics of first-year students in Canadian medical schools », CMAJ, 2002). Quelque 69 pour cent des pères et 48 pour cent des mères des étudiants en question étaient des professionnels ou des gestionnaires de haut rang, alors qu’ils ne représentent que 12 pour cent de la population canadienne. Plus révélateur encore : 17 pour cent de ces étudiants étaient issus de foyers dont le revenu dépasse les 160 000 $ par an (alors que seulement 2,7 pour cent des foyers canadiens gagnaient plus de 150 000 $ par an à l’époque).

Ce qui précède n’a pas empêché un professeur d’une école de médecine de m’avouer ce qui suit : « On pourrait accepter les 200 premiers étudiants figurant sur la liste d’admission. Ou les 200 suivants. Ou encore les 200 qui les suivent. Ça ne changerait probablement rien, on se retrouverait dans tous les cas avec de bons médecins. »

Comment rendre plus équitable un processus d’admission fondé sur des évaluations subjectives?

L’Université de Calgary, dont l’école de médecine est l’une des plus transparentes au Canada, aborde le problème de front. Sur le blogue du site de l’établissement consacré aux admissions en médecine, Ian Walker écrit qu’entre les meilleurs et les moins bons candidats, « il y a un très important groupe de candidats de qualité, relativement difficiles à départager. Nos systèmes de notation tentent bien de le faire, mais ils sont loin d’être efficaces ». Commentant les propos du Dr Walker sur ce blogue, un étudiant a qualifié de « loterie » le processus d’admission actuel.

En Ontario, le formulaire d’admission à l’école de médecine exige des candidats qu’ils cochent les cases d’une liste de 48 activités et réalisations depuis l’âge de 16 ans, et qu’ils mentionnent « toutes leurs expériences, structurées ou non, montrant leur capacité à cerner les besoins de leur collectivité et leur volonté de contribuer à y répondre ». Or, n’en déplaise aux membres des facultés de médecine, les étudiants contraints de travailler chez « McDo » n’ont guère de temps libre. Cocher les 48 cases du formulaire n’est pas évident pour eux.

Les hauts dirigeants des écoles de médecine admettent l’ampleur du défi à relever. D’après le Dr Walker, le problème ne tient pas qu’au processus d’admission. Il faut également que les établissements d’enseignement participent à la culture des futurs candidats en médecine dès le secondaire, et même avant.

On a besoin d’une réévaluation des processus d’admission afin de les rendre équitables pour tous
Selon Anthony Sanfilippo, de l’École de médecine de l’Université Queen’s, les programmes d’études secondaires doivent faire prendre conscience aux étudiants issus des groupes défavorisés ou sous-représentés qu’ils peuvent eux aussi ambitionner de devenir médecins. Sur son blogue consacré aux problèmes des écoles de médecine, le Dr Sanfilippo appelle à une réévaluation des processus d’admission afin de les rendre équitables pour tous. Il est en outre favorable au mentorat et aux programmes d’aide à l’intention des étudiants prometteurs qui ont théoriquement peu de chances d’entrer en médecine.

Pratiquement toutes les écoles de médecine réservent désormais des places aux étudiants issus des groupes sous-représentés, auxquels elles proposent mentorat et soutien. L’Université de Toronto, par exemple, offre de généreuses bourses d’études, un programme de soutien pour les étudiants noirs, ainsi qu’un programme d’admission ciblé pour les étudiants autochtones. Les écoles de médecine tentent également de rendre leurs critères d’admission plus équitables. Il n’en reste pas moins, hélas, que les étudiants issus des milieux favorisés bénéficient d’un avantage certain.

Marsha Barber est professeure à l’école de journalisme de l’Université Ryerson. Elle remercie son fils de sa collaboration à cet article.

This site is registered on wpml.org as a development site. Switch to a production site key to remove this banner.