L’importance de l’inclusion et de l’accessibilité dans la relation étudiant-enseignant

La fréquence des interactions entre étudiants et enseignants en dehors de la salle de classe ainsi que l’importance de l’accessibilité et de l’inclusion consignées dans une récente étude.

Student in class room

Quel est le secret d’un enseignement de qualité? D’après nos travaux, la réponse est toujours la même : c’est l’enseignant. Demander à quelqu’un de décrire son expérience universitaire revient à lui poser des questions sur ses enseignants. Qui étaient vos enseignants préférés? Qu’est-ce qui les rendait spéciaux? Comment vous ont-ils inspiré? Malheureusement – pour les chercheurs comme nous – ces enseignants remarquables ont mille visages. Ils sont sympathiques, enthousiastes, professionnels, calmes, compétents et curieux. Ils peuvent voyager dans la salle de classe ou rester sur l’estrade; utiliser des diapositives ou écrire deux mots sur le tableau après un monologue de trois heures. Ce bric-à-brac d’approches et cette versatilité peuvent étayer la carrière universitaire de leurs étudiants. L’essentiel est que ces professeurs se connaissent bien eux-mêmes, sur le plan personnel comme professionnel, et qu’ils agissent de façon mûrement réfléchie.

Cependant, pour que l’enseignement soit fructueux, il faut que les étudiants interagissent avec leurs enseignants de façon constructive. Si la durée de l’interaction importe peu, on constate en revanche que les étudiants utilisent différentes techniques de prise de contact en dehors de la salle de classe. Certains enseignants prévoient des heures de disponibilité (p. ex. : une heure par semaine), pour accueillir les étudiants qui souhaitent leur poser des questions. On peut parfois trouver la mention « heures de disponibilité sur rendez-vous » dans le syllabus, ainsi les étudiants doivent planifier l’interaction. Il y a aussi ceux qui organisent des séances de clavardage virtuelles où les étudiants posent leurs questions dans le système de gestion de l’apprentissage. En général, les étudiants restent quelques minutes après la fin du cours pour discuter de la matière du jour ou de logistique.

Des études antérieures montrent qu’un tiers des étudiants utilisent ces stratégies pour interagir avec leurs enseignants. Cela signifie que seulement un étudiant sur trois a accès à ce type de soutien. Nous nous sommes donc demandé si les différentes techniques de prise de contact amènent des obstacles qui empêchaient les étudiants d’en profiter. Notre étude récente mesure les interactions étudiants-enseignants pour toutes les modalités de contact. Nous avons étudié le tout auprès de deux groupes d’un même cours encadrés par trois enseignants qui, à tour de rôle, organisaient des heures de disponibilité libres ou sur rendez-vous. Nous avons noté le nombre de courriels entrants, le nombre d’étudiants qui restaient après la classe et le taux de participation aux clavardages virtuels.

Est-ce que la participation a augmenté en dehors des heures de cours? Est-ce qu’il y a eu plus d’interactions? Pas du tout. Parmi les 885 étudiants inscrits au cours, seulement 37 % ont communiqué au moins une fois avec l’un des enseignants (généralement par courriel). Dans l’ensemble, les étudiants sont beaucoup plus susceptibles de contacter un enseignant issu d’un groupe d’équité (femmes, personnes LGBTQ, personnes handicapées, etc.). Ce n’est pas étonnant. On a beaucoup parlé de l’augmentation de la charge de travail et de la charge émotionnelle des professeurs issus de groupes d’équité. Or, notre étude montre que nous avons mis l’accent sur la valorisation et la répartition de la contribution des enseignants, mais pas sur le droit des étudiants à bénéficier d’un encadrement de qualité.

Nous savons que l’identité de l’enseignant lui-même peut nuire à l’expérience de ses étudiants – ou l’améliorer. Nous savons aussi que l’identité de l’enseignant a un impact sur la façon dont les étudiants s’impliquent dans leurs études. Les étudiants issus de groupes d’équité y sont particulièrement vulnérables, un fait documenté par la littérature scientifique en éducation. Par conséquent, le choix des enseignants – surtout en première année, où les étudiants doivent prendre des décisions importantes sur leur avenir – est un enjeu d’équité pour les enseignants et les étudiants. Étant donnée la diversité limitée de notre équipe, nous nous demandons si nous pouvons faire mieux qu’un taux d’interaction de 37 %. Probablement pas. Mais est-ce que les étudiants méritent d’avoir des enseignants qui veulent les écouter et les motiver? Absolument.

Alors que nous voulions étudier l’importance de l’accessibilité et l’inclusion dans la relation étudiant-enseignant, ce que nous avons appris c’est que l’identité de l’enseignant est aussi un facteur essentiel. Les professeurs qui ne font pas partie de groupes d’équité (alliés et autres – enseignants comme administrateurs) doivent agir en conséquence. Si vous vous sentez « débordé » et « très sollicité » par les étudiants, imaginez quelle doit être la charge de travail de vos collègues issus de groupes d’équité. Nous devons tous faire de notre mieux pour reconnaître ce fardeau, le valoriser et le partager. En tant qu’administrateurs, nous devons encourager les professeurs à interagir avec les étudiants ainsi que féliciter et rémunérer ces efforts. C’est une nécessité.

Dans la suite des discussions sur l’équité, la diversité et l’inclusion, nous devons garder à l’esprit que notre engagement envers nos valeurs n’est (seulement) qu’un début, et qu’il faut briser le statu quo. Au lieu de recracher quelques perles rares, le système doit tous nous élever. Par conséquent, nous devons tenir compte de la matière enseignée, de sa place dans le curriculum et de la personne qui l’enseigne. Quand avez-vous eu un enseignant qui vous ressemblait? Tout de suite? Après une éternité? Jamais? Tout le monde mérite de progresser, de s’impliquer dans ses études et de se reconnaître dans ses enseignants. Pour ce faire, il faudra restructurer nos processus de recrutement, d’embauche et de rémunération. Autrement, nous n’incarnerons jamais les valeurs que nous défendons.

Shoshanah Jacobs est professeure adjointe au Département de biologie intégrative de l’Université de Guelph, où elle étudie le biomimétisme et l’enseignement supérieur; M. Alex Smith est professeur adjoint au Département de biologie intégrative et adore partager sa passion pour l’écologie et la biodiversité; Lisa Robertson est professeure adjointe, volet enseignement, au Département de biologie de l’Université York et chercheuse dans le domaine de l’enseignement supérieur; Victoria Rea étudie le lien entre le microbiome intestinal et le développement du cerveau dans le cadre de son doctorat à l’Université de Guelph; et l’écologiste Bailey Bingham est enseignante de sciences et travaille actuellement comme coordonnatrice de cours à l’Université de Guelph.

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