La curiosité scientifique et l’innovation vont de pair dans l’économie canadienne

Un groupe d’experts se penche sur la dynamique changeante entre le milieu universitaire et l’industrie relativement au développement économique du Canada.

18 septembre 2018

De dix à quinze ans avant le récent essor de l’intelligence artificielle (IA) et de la recherche sur l’apprentissage automatique à Montréal, les portes de la « tour d’ivoire » du Canada étaient plutôt fermées à l’industrie. Mais selon Martha Crago, vice-principale à la recherche et à l’innovation à l’Université McGill, le vent a tourné. « Les portes s’ouvrent à de nouveaux visages », a-t-elle expliqué lors d’une table ronde sur la recherche, l’innovation et la nouvelle économie tenue à Toronto le 14 septembre.

À l’occasion de cette vaste discussion organisée par l’Economic Club of Canada et animée par Ivan Semeniuk, journaliste scientifique au Globe and Mail, trois panélistes ont parlé de l’incidence de la curiosité scientifique sur l’innovation et sa commercialisation ainsi que sur l’économie canadienne. M. Semeniuk et Mme Crago étaient accompagnés de Molly Shoichet, une chercheuse en génie renommée de l’Université de Toronto qui, jusqu’à tout récemment, était scientifique en chef de l’Ontario, et de Paul Davidson, président-directeur général d’Universités Canada.

Selon Mme Shoichet, la recherche fondamentale « est à l’origine de l’innovation et de sa commercialisation. Si nous n’investissons pas dans la recherche, il n’y aura pas d’innovation et nous n’aurons rien à commercialiser ». Par un drôle de hasard, Uber avait annoncé, la veille de la table ronde, un investissement de 200 millions de dollars à Toronto en vue d’agrandir un laboratoire de recherche sur les voitures autonomes dirigé par un chercheur en IA de l’Université de Toronto, et d’ouvrir sa toute première installation d’ingénierie au Canada.

Les membres de la table ronde sur la recherche, l’innovation et la nouvelle économie qui s’est tenue à Toronto le 14 septembre. Photo de: Twitter / Research Matters @OntarioResearch.

Comparativement à d’autres pays, le Canada investit un faible pourcentage de son produit intérieur brut en recherche-développement, a souligné M. Semeniuk. Les investissements du secteur privé à cet égard sont par ailleurs faibles par rapport aux autres pays industrialisés. Quand on sait que le taux de réussite pour l’obtention de subventions est faible et qu’il est difficile pour les jeunes chercheurs de se tailler une place dans le système et d’y rester, on est en droit de se demander ce que notre pays a actuellement à offrir. M. Semeniuk a sollicité l’avis des panélistes sur la question.

« Beaucoup de choses fonctionnent très bien au Canada en ce moment, a expliqué M. Davidson. Le rapport Naylor est l’étude la plus exhaustive des 45 dernières années. Tous les problèmes ne se régleront pas en un an, il faut un plan pluriannuel. Les universités collaborent de plus en plus entre elles, avec le secteur privé et avec les collèges communautaires de toutes les régions du pays. »

Selon M. Davidson, l’initiative des supergrappes annoncée par le gouvernement fédéral l’année dernière est « un très bon exemple de recherche fondamentale ancrée dans une initiative de collaboration économique qui met à contribution toute la collectivité. » Les efforts des universités canadiennes en matière d’équité, de diversité et d’inclusion sont un autre point positif. « Une des plus grandes transformations dans les universités canadiennes a été l’adoption d’une série de principes d’excellence en matière d’inclusion qui stipulent que l’excellence est indissociable de l’inclusion. Ils démontrent que la recherche ne sert pas seulement l’élite, mais l’ensemble de la collectivité. »

Les panélistes ont aussi discuté de l’importance de garder le talent au Canada et d’encourager très tôt les jeunes à s’intéresser aux sciences et à l’entrepreneuriat. Mme Crago se réjouit de la présence d’un « billet à ordre » dédié au financement des étudiants aux cycles supérieurs et au postdoctorat dans le budget fédéral de 2018. « Nous espérons le retrouver dans le prochain budget, mais ce qui fonctionne dans ce pays, c’est d’apprendre aux étudiants à faire de la recherche et à innover par la pratique. Ils sont le moteur du milieu de la recherche », conclut-elle.

Pour visionner l’enregistrement de la table ronde, cliquez ici.

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