Le personnel de l’Université Saint-Paul passe à la semaine de quatre jours
Pendant le projet pilote de quatre mois, la semaine de travail des membres du personnel passera de 35 à 28 heures.
Depuis juillet dernier, les membres du personnel administratif de l’Université Saint-Paul, à Ottawa, travaillent quatre jours par semaine. Il s’agit d’une première pour un établissement postsecondaire canadien. Pendant ce projet pilote d’une durée de quatre mois, leur semaine de travail est réduite de 35 à 28 heures. Leurs salaires, congés et régimes de retraite, eux, ne changent pas.
Si la pandémie a mis en lumière des difficultés dans bien des milieux de travail, l’idée d’apporter un changement majeur à l’Université Saint-Paul fait son chemin depuis plusieurs années. « Nous voulions trouver des moyens d’améliorer le climat de travail et d’aider nos employé.e.s à décrocher », affirme Jean-Marc Barrette, vice-recteur à l’enseignement et à la recherche. Quand la COVID-19 a accentué ce besoin, le plan s’est mis en branle.
Malgré tout, il aura fallu passer par huit mois de consultations avec le syndicat pour s’assurer que ce soit réalisable, explique Carole Audet, vice-rectrice associée, Talent, diversité et culture. La plupart des modèles de semaines de quatre jours « sont en fait des semaines comprimées; on demande aux employé.e.s de travailler plus d’heures par jour pour compenser la journée de congé », observe Mme Audet. Mais l’établissement ne voulait pas emprunter cette voie. « C’est bénéfique pour l’équilibre travail-vie personnelle de nos employé.e.s. Nous reconnaissons leur droit d’avoir une vie à l’extérieur de nos murs. »
Mme Audet et M. Barrette admettent que l’idée d’avoir moins de temps pour accomplir les tâches était d’abord anxiogène. Mais c’est là que la flexibilité est entrée en jeu. Les membres de l’équipe peuvent choisir leur journée de congé selon le personnel en place et la charge de travail (le lundi et le vendredi étant les jours les plus populaires); ainsi, les services peuvent être offerts comme à l’habitude.
La vice-rectrice explique que l’objectif global du projet était d’opérer un changement de culture. Dès le début de son mandat, elle a suggéré à M. Barrette d’utiliser le modèle KISS (de l’anglais keep, improve, start, stop, soit garder, améliorer, commencer, arrêter). « Nous avons invité les gestionnaires et directeur.trice.s à adopter ce modèle au sein de leur équipe pour déterminer ce dont ils pouvaient se passer, poursuit-elle. D’après ce que j’entends, ça fonctionne bien jusqu’ici. »
Une approche qui gagne en popularité
Avant la pandémie, la semaine de quatre jours semblait utopique. Aujourd’hui, elle fait l’objet de projets pilotes partout dans le monde, tant dans le secteur public que privé. Ce changement est surtout dû aux bouleversements des deux dernières années, qui ont provoqué chez des millions d’employé.e.s du surmenage, de l’épuisement ou une retraite prématurée. Des sondages révèlent qu’en cette période pandémique, la majorité des travailleur.euse.s canadien.ne.s risquent l’épuisement et se sentent surchargé.e.s au travail, ce qui concorde avec les données mondiales. Et si la « grande démission » a frappé moins fort au Canada qu’aux États-Unis, il reste que selon un sondage mené par la société de conseil Mercer à la fin de 2021, plus de 60 % des employé.e.s canadien.ne.s songeaient à démissionner, une proportion beaucoup plus forte qu’en 2019.
On a beaucoup parlé des effets de la pandémie sur les étudiant.e.s, mais le personnel des établissements d’enseignement en a également souffert. Selon un article paru dans la revue Nature, des études menées aux États-Unis et en Europe révèlent que le nombre d’épuisements professionnels chez le personnel des universités a connu une hausse importante; dans certains cas, le nombre de répondants affirmant être stressés a plus que doublé depuis 2019.
De telles données n’existent pas pour les universités canadiennes, mais M. Barrette remarque que l’Université Saint-Paul a connu une légère hausse des congés liés au stress depuis le début de la pandémie – une tendance confirmée par ses homologues d’autres établissements.
Nancy Pelletier, coordonnatrice du bureau du registraire à l’Université Saint-Paul, confie avoir poussé un soupir de soulagement à l’annonce de la semaine de quatre jours. Comme bien des membres du personnel administratif, elle n’a pas pu travailler de la maison pendant la pandémie, et lorsque celle-ci battait son plein, aller au bureau était devenu éprouvant et stressant. Pour elle, ce changement est « une reconnaissance de la part de la direction que nous sommes importants et que nous avons traversé une période difficile ».
Avantages et inconvénients
La semaine de quatre jours a pour effet d’augmenter la productivité, l’efficacité et la satisfaction des employé.e.s, selon l’organisme 4 Day Week Global, qui milite pour la démocratisation de ce modèle. Certaines entreprises privées canadiennes l’ayant adopté indiquent non seulement qu’elles ont un meilleur taux de rétention et de satisfaction des employé.e.s, mais aussi qu’elles détiennent un avantage concurrentiel. Bien qu’il soit trop tôt pour tirer des conclusions définitives, selon Mme Audet, cela semble être également le cas pour l’Université Saint-Paul : récemment, plus de 20 candidatures ont été soumises pour un poste qui en aurait normalement attiré cinq.
Scott Fowler, gestionnaire des communications pour l’établissement, soutient que même si ses journées sont désormais plus occupées, il ne reviendrait pas en arrière. Le fait d’avoir du temps pour gérer le « stress extérieur » lui permet d’être plus présent au travail. « On arrive au boulot dans un tout autre état d’esprit. J’étais bien occupé avant aussi, mais maintenant je me sens dans une meilleure disposition. »
Évidemment, la semaine de quatre jours ne convient pas à tous les milieux, et peut même être dommageable, certains employeurs pourraient s’en servir comme prétexte pour réduire les salaires ou les occasions d’avancement. Par ailleurs, le changement s’opère très lentement dans le secteur public, puisqu’il faut tenir compte des conventions collectives.
Le passage à la semaine de quatre jours ébranle un paradigme en vigueur depuis si longtemps, ce qui peut être déconcertant. « Un tel projet doit susciter l’adhésion de tout le monde, souligne M. Fowler. Ce n’est pas comme si on achetait une nouvelle cafetière; c’est un changement majeur! »
À la fin du projet pilote de quatre mois, la direction de l’Université Saint-Paul évaluera les commentaires afin de proposer la semaine de quatre jours lors du renouvellement de la convention collective au printemps 2023. Pour M. Barrette et Mme Audet, il ne s’agit pas seulement d’attirer le talent, mais de faire en sorte que les employé.e.s actuel.le.s s’épanouissent davantage. « Nous leur donnons l’occasion de gérer leur semaine de travail, conclut la vice-rectrice. C’est une excellente façon de leur montrer qu’ils sont maîtres de leur temps. »
Postes vedettes
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
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