Le régime de retraite conjoint de l’Ontario prend de l’expansion

La création d’une plateforme administrative et une consultation sur l’investissement responsable sont au programme.

11 mars 2022
Coins on hand

À son lancement en juillet 2021, le régime de retraite universitaire (UPP), qui réunit les régimes de retraite de l’Universitée de Toronto, de l’Université Queen’s et de l’Université de Guelph, comptait 35 000 membres et son actif s’élevait à plus 11 milliards de dollars.

Déjà, ce tout jeune régime prend de l’expansion, ce qui marque, selon sa chef de la direction, Barbara Zvan, un « jalon majeur ». En effet, en mai dernier, l’Association des professeurs de l’Université Trent a voté pour le transfert de son régime de retraite et a officiellement joint l’UPP en janvier 2022. L’Université espère également obtenir l’autorisation de transférer le régime de retraite de ses employés à l’UPP.

Les déficits de solvabilité des caisses de retraite sont récurrents chez les universités ontariennes. D’ailleurs, selon son recteur Leo Groarke, l’Université Trent a des préoccupations à l’égard de son régime de retraite depuis un bon moment déjà. « À mon arrivée, il y a sept ans, les obligations découlant du régime de retraite figuraient en tête de liste des risques. » En 2014, quand l’idée d’un régime de retraite universitaire commun a été proposée, l’Université Trent a été l’un des six établissements à participer aux négociations initiales, aux côtés de l’Université Wilfrid Laurier et du collège universitaire King’s de l’Université Western. « À la base, nous ne sommes pas des gestionnaires de plans de retraite », souligne M. Groarke.

L’UPP mise sur les économies d’échelle, l’expertise des meilleurs spécialistes de la gestion des régimes de retraite et des placements, et la diversité et l’ampleur de son portefeuille. Un peu comme le fait le régime de retraite des enseignants et enseignantes de l’Ontario, qui investit dans l’immobilier et détient des intérêts majoritaires dans de nombreuses sociétés. Au fil de sa croissance, l’UPP entend offrir une expérience harmonieuse pour l’ensemble des gens étant à l’emploi d’universités membres en Ontario. « Le régime de retraite suit tout simplement ses membres », indique Herb Kunze, professeur de mathématiques à l’Université de Guelph et membre du comité de parrainage des employés de l’UPP. Autre avantage : les petits groupes d’employés sans régime de retraite sont les bienvenus. Les employés des associations de professeurs des universités de Guelph et de Toronto ont adhéré à l’UPP récemment; dans le cas de l’Université de Guelph, il n’est question que de quatre personnes.

Cinquième membre potentiel

Les membres de la direction de l’Université Wilfrid Laurier ont suivi de près l’évolution de l’UPP et espèrent y transférer l’unique régime de l’établissement. Ils ont présenté l’idée à l’ensemble de la communauté universitaire de l’établissement et entendent lancer d’ici quelques mois les pourparlers avec les six syndicats et les employés non syndiqués. « Pour nous, c’est une question de viabilité à long terme », explique Pamela Cant, chef des ressources humaines et responsable de l’équité à l’Université. « Nous voulons offrir un régime à prestations déterminées complet et concurrentiel tout en assurant sa viabilité financière et sa pérennité. » À l’heure actuelle, le régime de retraite de l’Université est bien financé, mais l’établissement sait que la situation pourrait bien changer si les marchés basculent.

La direction de l’Université approuve également le modèle de gouvernance de l’UPP, fondé sur une très grande transparence et un partage des risques entre les employeurs et les membres. Cela dit, Mme Cant admet que l’Université préfère attendre qu’un système administratif central soit en place avant de transférer le régime de retraite de son établissement à l’UPP. « Les universités fondatrices de l’UPP se chargent encore de l’administration de leur régime; nous préférons attendre que tout ait été mis en place. »

Il est vrai qu’il manque encore certaines infrastructures à l’UPP. D’ailleurs, le transfert de l’actif des régimes des trois universités fondatrices ne devrait être complété qu’à la fin avril. « Il y a beaucoup à faire en coulisses, et nous travaillons à plein régime, note Mme Zvan. Il faudra quelques années. » Le régime a publié un appel d’offres pour la conception de sa plateforme administrative. Il sollicite également l’avis des membres en ce qui a trait à l’investissement responsable.

L’investissement vert

Même si, dans sa politique, l’UPP dit s’engager à adopter des pratiques responsables dans l’ensemble de ses activités d’investissement, pour certains un doute subsiste. Un groupe représentant les professeurs des trois universités fondatrices a envoyé deux documents signés exhortant l’UPP à être plus transparent sur sa stratégie climatique et, notamment, à s’engager à liquider tous les placements dans les combustibles fossiles d’ici 2025 et à arriver à la carboneutralité d’ici 2040.

L’un des membres du groupe, Marcus Taylor, professeur agrégé en études du développement mondial à l’Université Queen’s, dit que ses collègues et lui craignent que le régime soit trop timide dans son action à cet égard. « L’énoncé de départ des politiques du régime reprenait mot pour mot les pires banalités des politiques du milieu des années 2010 », souligne M. Taylor, qui a aussi signé un texte d’opinion sur le sujet dans le Globe and Mail à l’automne dernier. « Nous sommes en 2022; notre réflexion et nos actions n’en sont plus du tout au même point. Nous avons une possibilité bien réelle de poser une action nouvelle et fraîche, libre des vestiges institutionnels », ajoute-t-il.

Dans son rôle précédent, alors qu’elle était chef des risques et responsable stratégique du régime de retraite des enseignants et enseignantes de l’Ontario, Mme Zvan a acquis de l’expérience en matière d’investissement responsable. Elle s’attend à ce que les commentaires des membres orientent les priorités d’investissement du régime. « Je suis convaincue que nous trouverons une méthode efficace, indique-t-elle. Nous tenons à bien analyser les risques liés aux changements climatiques pour investir en vue d’un avenir pérenne. »

Une fois que l’essentiel des questions fondamentales aura été réglé au sein de l’UPP, Mme Zvan compte intensifier son travail de mobilisation et d’information. « L’UPP a été créé pour l’ensemble du milieu universitaire. Mon travail consiste donc à faire valoir l’UPP de façon à convaincre d’autres universités à y souscrire. »

Étant donné le temps qu’il faut pour obtenir l’approbation des groupes d’employés, M. Kunze estime que l’UPP pourrait accueillir trois ou quatre autres établissements dans les cinq prochaines années. M. Groarke, lui, confirme que les dirigeants de l’Université Trent sont toujours aussi satisfaits de leur décision d’adhérer au régime. « Nous croyons toujours fermement que c’était la décision à prendre et que ce sera la bonne pour bien d’autres universités. »

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