Un traité pour réduire l’impact de la pandémie sur la relève en recherche

Un groupe de jeunes chercheurs veut inciter les grands acteurs du milieu à mieux soutenir la relève.

09 juillet 2020
Woman student on college campus learning wearing face mask while working on her laptop

Depuis le début de la pandémie de COVID-19, plusieurs jeunes chercheurs ont vu leur projet de recherche ou leur formation interrompus et leur avenir reste marqué d’incertitude. Un groupe d’entre eux ont lancé le Concordat pour limiter les impacts de cette crise sur la recherche – Concordat on Mitigating COVID-19 Pandemic Effects on Research en anglais (COMPEER).

Candidate au doctorat en kinésiologie à l’Université Laval, Lawrence Labrecque fait partie de l’équipe du Comité intersectoriel étudiant (CIE) des Fonds recherche Québec (FRQ), qui a imaginé et proposé le Concordat. Elle n’a pas eu à chercher loin pour trouver un exemple des effets négatifs de ce satané virus sur la recherche. Elle-même œuvre comme chercheuse au Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec. « À cause de la pandémie, les patients âgés et malades qui participaient à mon projet ne peuvent plus venir au centre de recherche, donc il est en pause pour une période indéterminée », raconte-t-elle. Elle se contente pour l’heure de travailler à partir de données déjà recueillies.

Ce contretemps pourrait allonger de façon significative la durée de son parcours doctoral. « Si mes études durent six mois de plus que prévu, est-ce que le financement suivra ? », s’inquiète la doctorante, qui est également boursière d’un organisme subventionnaire québécois. Elle attend aussi de voir comment tournera la situation pour évaluer l’impact de la pandémie sur la planification de la suite de sa carrière.

S’adapter à la réalité

« L’écosystème de recherche est très vulnérable face à une crise comme celle que l’on vit présentement, particulièrement dans le milieu académique dont la relève en recherche constitue la plus grosse composante », explique Jean-Christophe Bélisle-Pipon, vice-président du CIE et auteur principal du Concordat. Il est également chercheur invité en droit de la santé à l’Université Harvard. Selon lui, un bon nombre de jeunes chercheurs dépendent financièrement des universités, des revues scientifiques et des organismes de financement, entre autres. Or, la pandémie réduit la capacité de beaucoup d’étudiants de répondre aux exigences de ces acteurs.

C’est dans ce contexte que le CIE a élaboré le Concordat. Il regroupe 38 propositions adressées aux organismes de financement et aux gouvernements, aux établissements d’enseignement, aux associations scientifiques et organisateurs de conférences, aux éditeurs, aux comités d’éthique de la recherche et aux chercheurs et chercheuses, incluant la relève. L’équipe a immédiatement souhaité lui donner une portée mondiale, à l’image du système de recherche, lui-même très international.

L’intention première de COMPEER est de s’assurer que les acteurs de l’écosystème de la recherche évaluent l’impact de la pandémie sur la relève et adaptent leurs règles et leurs processus à cette réalité. « C’est d’autant plus important que l’effet sera différencié entre les individus, notamment en raison des disciplines dans lesquelles ils évoluent ou de la nature de leur sujet de recherche », ajoute M. Bélisle-Pipon.

En plus des programmes de recherche et des cours interrompus, la possibilité de poser sa candidature sur des projets postdoctoraux au cours des prochains mois pourrait être réduite. De la même manière, la mobilité internationale est fortement atténuée, ce qui crée un problème pour les étudiants d’ici qui devaient se rendre à l’étranger autant que pour ceux d’autres pays attendus au Canada.

En date du 7 juillet, 179 personnes avaient signé le Concordat, en plus de six organisations. « Nous faisons un gros effort de diffusion présentement, notamment sur les médias sociaux, explique Mme Labrecque. Nous ne voulons pas que l’initiative reste confinée au Canada, nous souhaitons qu’elle s’internationalise. » Mme Labrecque s’occupe de la validation des signatures. Elle a aussi grandement contribué à l’élaboration du site Internet et à la traduction en français du texte originalement écrit en anglais.

Faire preuve de flexibilité

Dès le départ, COMPEER a bénéficié de l’appui des FRQ, premiers signataires du Concordat. Les FRQ ont aussi financé la publicité et le développement du site Web. « Cette initiative très intéressante s’attaque à un vrai problème, juge le scientifique en chef du Québec, Rémi Quirion. Les impacts de la pandémie sur la relève en recherche sont bien réels et continueront de se faire sentir en septembre. »

Il estime que le plus important pour les organisations sera de faire preuve de flexibilité au cours des prochains mois dans l’étude des dossiers et les autres processus. Les FRQ ont à ce titre annoncé en avril dernier que le financement qu’ils octroient aux regroupements stratégiques, centres, instituts et réseaux de recherche se voyait automatiquement prolongé d’un an. « Nous révisons maintenant le traitement des dossiers des étudiants dont la formation devait se terminer au printemps, mais a été interrompue par la pandémie, poursuit M. Quirion. Devrions-nous, par exemple, allonger de quelques mois le financement des boursiers et boursières ? »

M. Bélisle-Pipon présente le Concordat comme une main tendue. « Il faudra du temps pour s’adapter aux retombées de la pandémie, mais la crise actuelle génère une occasion pour améliorer certaines pratiques universitaires et bâtir un écosystème de recherche plus inclusif et encore plus efficace. »

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