Évolution du corps professoral à temps plein au Canada en six graphiques
Analyse de quelques résultats des enquêtes SPEUC menées entre 1970 et 2016.
L’an dernier, Statistique Canada a rendu publics les résultats de l’enquête Système d’information sur le personnel d’enseignement dans les universités et les collèges (SPEUC), pour la première fois depuis cinq ans. L’enquête avait en effet été abandonnée en 2012 avant d’être relancée en 2016. Les données sur les professeurs à temps plein de 112 universités et collèges canadiens offrent un précieux portrait du corps professoral au Canada (les derniers résultats sont abordés ici).
Bien que sa première édition remonte à 1937, l’enquête SPEUC n’est menée en continu que depuis 1970. L’étude attentive de ses résultats depuis 1970 a permis à Affaires universitaires d’établir les six graphiques ci-dessous, qui illustrent partiellement l’évolution du corps professoral à temps plein sur près de cinq décennies (aucune donnée n’était disponible pour la période 2011-2015, au cours de laquelle l’enquête SPEUC avait été suspendue).
Placez votre curseur sur chacun des graphiques pour voir les données plus détaillées. Veuillez noter que les années affichées représentent les années universitaires (p. ex. 2016-2017, 1970-1971) plutôt que les années de calendrier.
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Les femmes étaient peu nombreuses au sein du corps professoral au moment de la première enquête, en 1937. Toutefois, leur nombre a connu une progression constante au cours des 47 dernières années (graphique 1). En 1970, les femmes ne constituaient que 13 pour cent du corps professoral à temps plein (3 138 femmes sur 24 597 professeurs). En 2016, elles représentaient 40 pour cent du corps professoral à temps plein (18 099 femmes sur 45 660 professeurs).
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Examinons maintenant l’écart salarial entre les hommes et les femmes (graphique 2). Bien que la proportion de femmes au sein du corps professoral progresse, les hommes sont encore mieux rémunérés qu’elles. L’écart salarial médian entre les sexes (en dollars constants) a atteint son paroxysme en 1990 – les hommes gagnaient alors 22 pour cent de plus que les femmes. Les dernières données issues de l’enquête SPEUC montrent toutefois que cet écart diminue; en 2016, il n’était plus que d’environ 12 pour cent (le salaire médian des hommes était alors de 136 844 $, contre 121 872 $ pour les femmes).
Les différences de représentation dans les rangs peuvent expliquer l’écart salarial entre les hommes et les femmes (graphique 3).
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Au Canada, les hommes sont proportionnellement beaucoup plus nombreux que les femmes parmi les professeurs titulaires et agrégés, et donc à occuper les postes les mieux rémunérés au sein du corps professoral. Cette situation perdure depuis plus de quatre décennies. (Remarque : Le graphique 3 montre qu’au Canada, le nombre (13 387) et la proportion (91 pour cent) de professeurs titulaires masculins ont atteint leur maximum en 1992, soit pratiquement au moment où l’écart salarial entre les sexes était le plus marqué.) Il se peut que le rétrécissement de cet écart salarial au cours de la dernière décennie soit lié à l’accroissement du nombre de femmes parmi les professeurs titulaires et agrégés pendant cette période.
Le graphique 4 illustre la situation d’ensemble, par rang :
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Certaines tendances intéressantes se dégagent du graphique ci-dessus en ce qui concerne les professeurs titulaires, agrégés et adjoints. Ce graphique permet, par exemple, de suivre, entre 1972 et 1994, la progression dans les rangs, au fil de leur carrière, d’une cohorte de professeurs adjoints (très majoritairement masculine selon le graphique 3).
En 1972, on comptait 9 494 professeurs adjoints (85 pour cent de sexe masculin), 5 743 professeurs titulaires (96 pour cent de sexe masculin) et 7 979 professeurs agrégés (91 pour cent de sexe masculin).
Douze ans plus tard, en 1984, le nombre de professeurs adjoints avait chuté d’environ 30 pour cent, tandis que le nombre de professeurs agrégés avait bondi d’environ 61 pour cent. En 1994, une décennie après l’atteinte d’un premier plafond du nombre de professeurs agrégés et plus de 20 ans après le début présumé du cheminement de cette cohorte vers la permanence, en 1972, le nombre de professeurs titulaires atteignait 14 854 (89 pour cent de sexe masculin) – un record dépassé en 2010, année où le nombre de professeurs titulaires a atteint 14 946 (77 pour cent de sexe masculin). En 2016, le nombre de professeurs titulaires était de 16 239 (72 pour cent de sexe masculin), tandis que le nombre de professeurs agrégés atteignait le plafond historique de 16 272 (environ 57 pour cent de sexe masculin).
Si le nombre de professeures a progressé au cours de la dernière décennie, il semble que cette période ait aussi été marquée par leur progression dans les rangs. C’est du moins ce que suggère le chevauchement, à partir de 1992, des courbes du graphique 3 relatives aux professeures adjointes (en jaune) et aux professeures agrégées (en vert).
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Le graphique 5 vient confirmer une chose que les universitaires savaient déjà : de nombreux professeurs mettent longtemps à accéder au statut de professeur à temps plein. Peu d’entre eux y parviennent avant 39 ans (l’âge moyen d’obtention d’un doctorat au Canada est de 35 ans). De plus, alors que les professeurs à temps plein âgés de 30 à 39 ans représentaient environ 20 pour cent de l’ensemble des professeurs entre 2005 et 2008, un net recul s’est produit depuis, de sorte qu’ils n’en représentent plus qu’environ 15 pour cent en 2016. Pendant ce temps, la proportion du nombre de professeurs de 60 ans et plus parmi l’ensemble du corps professoral n’a cessé de croître, pour atteindre environ 23 pour cent en 2016 (contre environ 18 pour cent en 2008).
Comme l’ensemble de la main-d’œuvre canadienne, le corps professoral vieillit. Cette tendance coïncide avec l’abolition de la retraite obligatoire.
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Le graphique 6 illustre ce vieillissement global du corps professoral. L’âge médian des professeurs à temps plein est passé de 37 ans en 1970 à 51 ans en 2016. En ce qui concerne les professeurs adjoints (généralement considérés comme étant la première étape menant à la permanence), leur âge médian est de 39 ans. C’est à peine six ans de plus que l’âge médian des professeurs adjoints en 1970, mais cela semble indiquer que les universitaires atteignent aujourd’hui plus tardivement le chemin de la permanence. L’âge médian des titulaires de postes inférieurs à celui de professeur adjoint (professeurs embauchés pour une durée limitée, etc.) a lui aussi nettement augmenté, passant de 30 ans en 1970 à 49 ans en 2016. D’ailleurs, le fait que l’âge médian de ceux qui occupent d’autres rangs a fait le plus grand bond, passant de 34 ans en 1970 à 52 ans en 2016, peut indiquer que de plus en plus d’universitaires occupent pendant longtemps des postes à temps plein qui ne mènent pas forcément à la permanence.
Que nous réserve l’avenir?
Statistique Canada devrait publier en avril les premiers résultats de l’enquête SPEUC 2017-2018. L’organisme étudie actuellement la possibilité de recueillir des données sur les professeurs à temps partiel dans le cadre des enquêtes à venir, ainsi que des données relatives à l’appartenance ethnique et à d’autres aspects démographiques.
Nous tenons à remercier Teresa Omiecinski, de Statistique Canada, qui nous a communiqué les versions antérieures des graphiques inclus dans le présent article, adaptées par Affaires universitaires pour les besoins de l’article. Les graphiques ci-dessus sont basés sur les données du Système d’information sur le personnel d’enseignement dans les universités et les collèges (SPEUC) – Personnel enseignant à plein temps (tableau CANSIM 477-0018), ainsi que du SPEUC dans son ensemble, communiquées à Universités Canada à sa demande, puis transmises à Affaires universitaires.
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