Placer les personnes hôtes au cœur de l’apprentissage par le service international

Les personnes hôtes représentent un aspect crucial de l’expérience étudiante. Voici cinq recommandations pour leur offrir un traitement équitable.

Picture of a family playing a board game together

L’apprentissage par le service international est connue pour se concrétiser sous la forme d’étudiant.e.s, souvent originaires de pays de l’hémisphère Nord, qui se rendent dans un autre pays, généralement de l’hémisphère Sud, pour faire du bénévolat.

La montée de l’enseignement en ligne a rendu cette activité plus accessible pour de nombreuses personnes, et changé la donne en matière de liens internationaux. Dans un récent volume codirigé du Michigan Journal of Community Service Learning, les autrices réfléchissaient aux effets qu’a eue l’interruption des voyages sur l’apprentissage par le service international ainsi qu’aux hypothèses pédagogiques intégrées aux pratiques. Elles remettaient notamment en doute l’hypothèse voulant que les rencontres en contexte d’apprentissage par le service doivent se faire en personne, et l’idée que les rencontres sont nécessairement transformatrices (dans le bon sens du terme) pour les étudiant.e.s qui font du travail communautaire.

On oublie souvent de s’intéresser aux expériences des personnes hôtes, qui accueillent des étudiant.e.s chez elles, à leur travail et dans leur collectivité (quoique les choses tendent à changer, comme on le constate dans ce numéro récent de Frontiers). Ces personnes prennent le temps de se préparer à accueillir les étudiant.e.s et s’inquiètent de leurs expériences, sans compter tout le travail d’accompagnement. En nous fondant sur nos projets conjoints de recherche auprès des personnes hôtes, nous proposons cinq recommandations pour placer l’équité au cœur des programmes d’apprentissage par le service international :

1. Partager les ressources universitaires

Dans le cadre de nos travaux, les personnes hôtes nous ont souvent mentionné désirer une relation avec l’université qui serait plus directement profitable. Maintenant que l’enseignement hybride est une réalité bien ancrée, nous proposons que le partenariat s’accompagne de possibilités virtuelles d’éducation pour les membres de la collectivité.

2. Offrir une rémunération adéquate

Les personnes hôtes consacrent beaucoup de temps à se préparer à accueillir les étudiant.e.s, à réfléchir à leurs expériences et à les accompagner pendant leur séjour. Leur rémunération devrait tenir compte de ce temps consacré et de l’expertise sollicitée. Au-delà d’une rémunération financière directe, nous proposons de donner accès aux expériences dont profitent les étudiant.e.s (p. ex., visite de musées, de plages, de lieux d’importance nationale).

3. S’appuyer sur les principes de soin

La pandémie nous a montré (au moins pour un temps) l’importance de nos liens avec autrui : aide mutuelle, soins de santé, effet de nos liens mondiaux. Pour Dean Spade, l’aide mutuelle est « l’acte radical consistant à prêter attention à autrui tout en s’efforçant de changer le monde ». Comment évoluerait votre programme d’apprentissage par le service international si l’aide mutuelle représentait un principe directeur? Puisque ce travail doit se faire en collaboration avec la collectivité, nous ne pouvons offrir de recommandations précises à cet égard.

4. Nouer un partenariat avec les personnes hôtes

Vraisemblablement, les personnes hôtes et les universités travailleront ensemble pendant des années. Nous proposons donc aux universités et aux responsables de programme d’intégrer les personnes hôtes à la planification des programmes et d’effectuer une planification sensible aux résultats souhaités par ces dernières. Quelques pistes de réflexion : qu’est-ce qui pousse les personnes hôtes à participer au programme d’apprentissage par le service international? Quels sont les avantages? Quelles sont les difficultés?

5. Viser l’inclusion

L’apprentissage par le service international est souvent façonné par les hypothèses des étudiant.e.s de race blanche de la classe moyenne, ce dont témoignent bien des objectifs d’apprentissage. Pensons par exemple aux compétences culturelles dans un contexte où plusieurs peuvent déjà posséder une sensibilité interculturelle. Nous proposons que les programmes soient rendus plus accessibles et plus abordables et qu’ils mettent de l’avant l’éthique de la mutualité plutôt que d’aborder l’apprentissage étudiant comme une manière de s’éloigner des hypothèses entourant la transformation de l’étudiant.e de race blanche. Comment les expériences des autres étudiant.e.s sont-elles comprises (voir ce formidable article de Gabrielle Hickman)? Quels sont les besoins d’accessibilité de votre campus (par exemple chez les étudiant.e.s à temps partiel)?

Après de nombreuses années de travail et de recherche dans le domaine de l’apprentissage par le service international, nos sentiments à cet égard sont complexes. Si nous avons toutes deux constaté le potentiel transformateur que peuvent avoir le développement de relations, l’apprentissage humble et l’engagement dans les collectivités hôtes, nous avons aussi vu l’étendue des dommages lorsque des étudiant.e.s intègrent des collectivités sans préparation, sans maîtriser la langue et sans soutien continu. Nous attachant à favoriser la mutualité dans le contexte de l’apprentissage par le service, nous avons créé le site Web Transnational Service Learning en vue d’en faire une plaque tournante pour les personnes désireuses de faire ce travail. Le site renferme des ressources pédagogiques interactives visant à aider les étudiant.e.s à se préparer à leur voyage et les responsables du développement des programmes à réfléchir à leur conception. Nous comptons également ajouter des ressources pour les personnes hôtes.

Maintenant que les universités recommencent à accompagner les étudiant.e.s qui font des séjours d’apprentissage par le service international, nous espérons que les principes de mutualité guideront la (re)création de partenariats qui favoriseront l’apprentissage et la transformation des étudiant.e.s comme des personnes hôtes ainsi que le travail visant à changer le monde.

Katie MacDonald est professeure adjointe en sociologie à l’Université Athabasca. Jessica Vorstermans est professeure adjointe à la Faculté de santé de l’Université York. Elles sont toutes deux des universitaires blanches habitant sur les territoires colonisés visés par le Traité no 6 et le Traité no 13. Dans ses travaux, Mme MacDonald s’intéresse au féminisme transnational à la lumière de deux sources d’iniquité : l’apprentissage par le service international et le logement abordable. Mme Vorstermans effectue des interventions critiques dans le domaine de l’apprentissage par le service international, faisant intervenir une pluralité d’idées entourant les droits de la personne, le handicap et l’équité.

Ce texte a été rédigé en collaboration avec la Communauté de pratique de l’internationalisation des affaires étudiantes de l’Association des services aux étudiant.e.s des universités et collèges du Canada (ASEUCC). Pour toutes questions ou commentaires, veuillez écrire à in***********@ca****.ca.

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