Savoir accueillir les conférenciers dans son cours
Présenter une expertise variée aux étudiants exige de l’attention, de la préparation et des compétences d’animateur.
En tant que personne blanche dont les ancêtres ont fait partie des colonisateurs, inviter des conférenciers dans ma classe est pour moi une façon d’atténuer mon autorité, de mettre en lumière l’expertise d’autres chercheurs et de donner à mes étudiants issus de milieux diversifiés l’occasion de se reconnaître chez des experts.
Offrir un bon accueil commence bien avant l’arrivée du conférencier. J’ai élaboré une série de pratiques exemplaires pour l’accueil des invités, fondées sur mon expérience d’accueil d’universitaires, d’auteurs et d’organisateurs communautaires dans mes cours et sur mon expérience en tant que conférencière pendant mes études supérieures. Ces pratiques consistent essentiellement à valoriser le travail des invités et à établir des rapports réciproques.
Valoriser le travail des conférenciers
Donner une conférence exige un grand effort intellectuel et émotionnel. Il est particulièrement important de souligner le travail des jeunes universitaires, des artistes émergents ainsi que des conférenciers racisés, queers, handicapés ou issus d’autres minorités. Trop souvent, les experts de ces groupes sont invités à transmettre leur savoir, sous prétexte que cela représente une « bonne expérience ». Les invités devraient retirer des avantages tangibles de leur visite dans votre classe, comme des honoraires adéquats, du mentorat ou un échange de services.
Honoraires : En général, les honoraires payés ne valorisent pas suffisamment le travail fourni. Le barème des tarifs minimums du CARFAC (le Front des artistes canadiens) pour les présentations et les consultations constitue un bon outil pour mieux évaluer le travail fourni avant et pendant la conférence. Si le budget du département ne permet pas d’offrir des honoraires appropriés, proposez à d’autres professeurs ou à des groupes universitaires de combiner vos fonds pour rehausser l’impact de la conférence. Une activité de plus grande envergure, par exemple destinée au public, pourrait donner droit à une aide financière de votre établissement.
Mentorat : Outre une compensation financière, donner une conférence pourrait constituer une occasion de développement professionnel pour un étudiant aux cycles supérieurs. Mais le travail de préparation d’une conférence n’est pas une récompense en soi. Selon le cas, l’hôte peut offrir un précieux accompagnement s’il consulte le plan d’enseignement de l’invité, formule des commentaires ou lui remet une lettre d’observation officielle à inclure dans son dossier d’enseignement.
Échange de services : Si les honoraires sont insuffisants, un échange de services pourrait valoriser le travail de l’invité. Lesquelles de vos compétences pourraient s’avérer utiles au conférencier? Vous pourriez ainsi donner une conférence à votre tour, offrir des services de révision ou d’aide à la rédaction d’un manuscrit, enregistrer la conférence ou l’exposé sur vidéo et en faire le montage. Demandez à votre invité si un échange de services présenterait une valeur substantielle à ses yeux.
Collaborer
Demandez au conférencier quels aspects de son travail il aimerait présenter. Certains voudront présenter un travail déjà publié, alors que d’autres préféreront parler de leurs nouveaux projets. Discutez des lectures appropriées pour préparer vos étudiants avant la conférence. Votre invité ne connaît pas vos étudiants aussi bien que vous. Il est donc important de lui donner des précisions sur les connaissances et l’expérience de vos étudiants, la taille de la classe et la façon dont son intervention s’inscrit dans votre cours.
Éviter la simple portée symbolique
Au-delà de leurs propres travaux, les conférenciers incarnent souvent des idées, des œuvres et des contextes, surtout s’il s’agit de personnes racisées, queers, handicapées ou issues d’autres minorités. Pour éviter la portée symbolique, il faut y réfléchir dès la conception du cours. Une bonne tactique consiste à présenter des lectures variées. Si votre invité est le seul universitaire noir ou autochtone dans votre plan de cours, il est possible que les étudiants le perçoivent comme le représentant d’une communauté.
Préparer les étudiants
Même si les silences font partie de l’enseignement, rien n’est plus gênant qu’un long silence qui suit un exposé. Préparez vos étudiants pour qu’ils se sentent à l’aise d’interagir avec le conférencier. Par exemple, invitez-les à lire le travail de l’invité et discutez-en en groupe avant sa visite, ou présentez le conférencier et son domaine d’expertise dans le contexte de votre cours. Créez un espace de réflexion avant l’arrivée de votre invité afin d’enrichir l’expérience.
Animer la discussion
Malgré son caractère plus intime qu’une conférence publique, une visite en classe exige une animation active. Un bon hôte sait créer un contexte propice à la discussion entre l’invité et les étudiants. M’inspirant de la démarche féministe autochtone pour faciliter les périodes de questions d’Eve Tuck, je demande aux étudiants de préparer des questions après leur lecture du travail du conférencier, puis d’en discuter en petits groupes. Après la conférence, les étudiants revoient leurs questions avec un collègue. Ce genre d’examen entre les pairs offre un cadre pour faire le lien entre leurs réflexions initiales et l’exposé, les aide à se sentir plus à l’aise de poser des questions et donne à l’invité une petite pause après son exposé.
Partager les tâches d’accueil
L’accueil est un projet collectif. Invitez vos étudiants à s’investir dans la classe en participant à l’accueil du conférencier, par exemple en préparant une biographie ou en présentant l’invité pour répartir l’attention et partager la responsabilité de l’accueil.
L’accueil de conférenciers peut faire émerger des idées et élargir la réflexion des étudiants. Comme professeurs, nous voyons parfois les conférences données par un tiers comme un congé de préparation de cours. Cependant, nous devons reconnaître que pour établir de bons rapports et présenter une expertise variée aux étudiants, il faut de l’attention, de la préparation et des compétences d’animateur.
Cet article s’inscrit dans la recherche financée par l’Université McMaster dans le cadre de la bourse IDEAS offerte par le Paul R. MacPherson Institute for Leadership, Innovation, and Excellence in Teaching et le Bureau de l’équité et de l’inclusion.
Danielle Taschereau Mamers est titulaire d’une bourse postdoctorale du Conseil de recherches en sciences humaines à l’Université McMaster. Son site Web est le suivant : https://www.dtmwrites.com/.
Postes vedettes
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
Laisser un commentaire
Affaires universitaires fait la modération de tous les commentaires en appliquant les principes suivants. Lorsqu’ils sont approuvés, les commentaires sont généralement publiés dans un délai d’un jour ouvrable. Les commentaires particulièrement instructifs pourraient être publiés également dans une édition papier ou ailleurs.