Commotions cérébrales : les parents pauvres de la recherche
Lors d’une récente conférence tenue à l’Université McGill, des experts en médecine et d’anciens athlètes ont réclamé davantage de ressources en recherche et en éducation sur les traumatismes cérébraux.
Le nombre de commotions cérébrales atteint des proportions alarmantes au pays, ont affirmé des conférenciers lors de la conférence TÊTES HAUTES au sujet des commotions cérébrales, qui se déroulait récemment à l’Université McGill. Chaque année, quelque 160 000 Canadiens (des victimes d’accidents et des athlètes de tous les niveaux) subissent un traumatisme craniocérébral (TCC), soit 600 cas pour 100 000 habitants.
« Comparez cette incidence à celle d’autres troubles neurologiques », lance Alain Ptito, directeur du Département de psychologie du Centre universitaire de santé McGill. Chaque année, 20 nouveaux cas de maladie de Parkinson et 3 nouveaux cas de sclérose en plaques sont diagnostiqués sur 100 000 habitants. « Néanmoins, la recherche sur les TCC est sous-financée », soutient M. Ptito.
« Les TCC ne font pas l’objet de suffisamment d’attention ou de recherche. Il s’agit pourtant d’une cause importante d’incapacité et de décès », affirme Guy Rouleau, organisateur de l’événement et directeur de l’Institut et hôpital neurologiques de Montréal, appelé aussi le Neuro.
Selon le Dr Rouleau, les cas de TCC comptent parmi les plus frustrants à traiter. « Il existe très peu de tests objectifs pour évaluer la lésion, explique-t-il. Nous ne pouvons prévoir ni les taux de rétablissement, ni les complications, ni les conséquences potentielles à long terme des commotions à répétition. Nous ne savons pas non plus pourquoi certaines personnes sont plus vulnérables que d’autres. »
Les traumatismes crâniens liés au sport ont fait l’objet d’une attention particulière pendant la conférence. Le conférencier J. Scott Delaney a révélé que 45 pour cent des joueurs de la LCF ont indiqué dans le cadre d’un sondage anonyme avoir déjà subi au moins une commotion cérébrale. M. Delaney, médecin des équipes de football et de soccer (hommes et femmes) de l’Université McGill et d’équipes professionnelles montréalaises, a également fait un sondage similaire auprès des athlètes universitaires canadiens, peu après son arrivée à l’Université. Selon cette étude, parue en 2002, 70 pour cent des joueurs de football et les deux tiers des joueurs de soccer présentent des symptômes de commotion courants.
Le Dr Delaney croit que si l’étude était répétée aujourd’hui, les résultats seraient comparables. « À mon avis, les athlètes sont mieux informés qu’avant; ils savent reconnaître les symptômes. Voilà la principale différence. Au début des années 2000, seulement 20 pour cent des athlètes pouvaient les reconnaître. »
Pour lui, ce changement est attribuable aux campagnes d’information, mais surtout à la couverture médiatique de cas notoires illustrant bien les dangers des commotions cérébrales. Parmi ces dangers, notons le risque accru de développer une maladie neurodégénérative, comme la sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou l’encéphalopathie traumatique chronique (ETC). L’ETC a fait les manchettes ces dernières années en raison de son éventuel rôle dans le suicide d’anciens athlètes professionnels.
La conférence a également servi à recueillir des fonds pour les initiatives de recherche du Neuro, réalisées en partenariat avec l’Université de Montréal et l’Institut de réadaptation de Toronto, qui s’efforcent d’approfondir les connaissances scientifiques sur les traumatismes cérébraux.
Dans le cadre d’un de ces projets, le Neuro soumet des athlètes universitaires à des tests d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) avant la saison. S’ils subissent une commotion cérébrale pendant la saison, le test est répété. Chez les personnes ayant subi une commotion, l’activité tend à diminuer dans plusieurs régions du cerveau, ce qui illustre les conséquences neurologiques des commotions.
Selon le Dr Delaney, malgré la sensibilisation croissante, de nombreux athlètes universitaires cherchent toujours à cacher leurs symptômes pour continuer à jouer. « La saison universitaire est très courte. […] Les athlètes cachent souvent leurs blessures, pas seulement les commotions, car ils ont peu de temps pour montrer ce dont ils sont capables », explique-t-il.
« Nous devons continuer à éduquer les athlètes au sujet des risques. C’est ce qui contribue le plus à changer les comportements », poursuit-il.
Cette année, l’Université McGill a lancé un projet pilote prometteur dans le cadre duquel les athlètes et leurs entraîneurs signent une « entente sur les commotions ». « Nous leur fournissions de l’information ainsi qu’une série de consignes. En signant l’entente, ils s’engagent à les respecter. Ils doivent ainsi nous consulter s’ils ressentent des symptômes. Ils savent qu’ils ne pourront revenir au jeu sans l’autorisation d’un médecin », précise le Dr Delaney.
L’entente oblige les entraîneurs à confier les athlètes qui présentent des symptômes à l’équipe médicale et « renforce l’idée que les études priment sur le sport. L’étudiant doit participer pleinement à ses activités pédagogiques avant de pouvoir réintégrer le programme sportif ». Ce type d’entente fait en sorte « qu’il n’y a jamais le moindre doute sur la marche à suivre lorsqu’une personne présente des symptômes. Avant même le début de la saison, chacun sait à quoi s’en tenir ».
La conférence TÊTES HAUTES a permis à certaines victimes de commotion bien connues (d’anciens athlètes professionnels) d’unir leur voix à celle du milieu universitaire pour réclamer la hausse du financement alloué à la recherche et exhorter les ligues sportives à tenir compte des dernières avancées scientifiques.
Ken Dryden, membre du Temple de la renommée du hockey et ancien gardien de but des Canadiens de Montréal, a subi deux commotions cérébrales. Elles ne sont pas survenues pendant sa carrière de joueur, mais l’ont incité à sonner l’alarme au sujet des traumatismes crâniens, « la plus grande menace pour l’avenir du sport ».
Bien que les athlètes connaissent beaucoup mieux qu’avant le problème des commotions et les équipes, les protocoles pour y répondre, « je m’inquiète plus que jamais au sujet du sport », avoue M. Dryden. Il ajoute que l’évolution des méthodes d’entraînement et de la performance fait en sorte que « tout devient possible et que les extrêmes deviennent la norme. De nombreux sports courants il y a 20 ans sont devenus des sports extrêmes ».
Mike Richter, lui aussi membre du Temple de la renommée et ancien gardien des Rangers de New York, a parlé avec émotion des deux commotions qui ont mis fin à sa carrière dans la Ligue nationale de hockey. En entrevue après la conférence, il a abondé dans le sens de M. Dryden. « Les athlètes sont plus costauds, plus forts et plus rapides qu’il y a 10 ans, et les collisions sont plus violentes, souligne-t-il. Mais le cerveau humain, lui, n’est pas plus solide qu’avant. »
M. Richter, à la retraite depuis 13 ans, garde espoir que les changements apportés aux règlements, l’amélioration de l’équipement et la sensibilisation contribueront à atténuer le problème. Il s’est dit impressionné par la façon dont les Penguins de Pittsburgh ont géré le cas de Sydney Crosby, tenu à l’écart du jeu pendant des mois en raison de symptômes de commotion. « Si vous pouvez retirer le meilleur joueur au monde de son équipe aussi longtemps, vous pouvez certainement le faire pour un joueur peewee », conclut-il.
Postes vedettes
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
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