L’action climatique à l’université : jeunesse engagée et initiatives novatrices

Pour les étudiant.e.s comme pour les universités, la mobilisation pour freiner les changements climatiques continue de s’accentuer.

24 novembre 2023
Students standing around a table with note cards
Des étudiant.e.s en compagnie de l’animateur lors de l’atelier Fresque du climat à Québec le 30 octobre 2023. Photo par Mohamed Berrada.

Les jeunes sont appelé.e.s à prendre les rênes et à accepter que « leur vie va subir des transformations inévitables, que cela leur plaise ou non ». Tel est le message transmis par Jean Lemire, émissaire aux changements climatiques et aux enjeux nordiques et arctiques pour le Québec, aux étudiant.e.s venu.e.s de 33 pays membres du réseau des Clubs leaders étudiants francophones, rassemblé.e.s dans le cadre du Congrès de la jeunesse estudiantine francophone, un événement qui a eu lieu le 30 et le 31 octobre à Québec. Lors de ce rassemblement, l’accent a été mis sur le développement durable, notamment à travers des conférences, des ateliers participatifs et la présentation de résultats des consultations visant à canaliser les aspirations des jeunes pour un avenir plus durable. « Nous avons choisi ce thème pour sensibiliser les étudiant.e.s provenant des pays du Sud à l’importance du développement durable », explique Slim Khalbous, recteur de l’Agence universitaire de la Francophonie – organisatrice de l’événement.

Si M. Lemire regrette l’échec des engagements de l’Accord de Paris sur le climat, il demeure cependant optimiste quant à l’avenir, car « les jeunes d’aujourd’hui sont de plus en plus familiers et familières avec les notions de développement durable et sont prêt.e.s à s’engager pour un avenir plus vert ».

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Des étudiant.e.s en compagnie de l’animateur lors de l’atelier Fresque du climat à Québec le 30 octobre 2023. Photo par Mohamed Berrada.

La Fresque du climat

Des notions que ces étudiant.e.s ont d’ailleurs pu mettre en œuvre durant la Fresque du climat, un atelier pédagogique inventé en France et qui se répand à travers le monde. Étendu sur une durée de trois heures et articulé en trois phases distinctes, l’exercice débute par une phase technique où les participant.e.s construisent collectivement une fresque en reliant 42 cartes selon les liens de cause à conséquence présentés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Ensuite, la phase artistique permet aux participant.e.s de décorer la fresque à leur guise et de lui attribuer un titre. Enfin, la dernière phase consiste en un débreffage où chacun.e exprime ses sentiments et discute des solutions individuelles ou collectives contre les changements climatiques. S’addressant à divers publics, l’outil pédagogique est principalement pratiqué dans les établissements éducatifs et en milieu professionnel et, depuis septembre 2019, dans les établissements d’enseignement supérieur.

Mickael Brard, animateur et formateur de la Fresque du Climat au Québec, décrit cette dernière comme étant un moyen puissant de sensibiliser aux enjeux climatiques. « On n’est pas dans l’apprentissage, on est dans la compréhension des causes, des conséquences et du fonctionnement. » Il souligne que cet atelier se distingue par son approche systémique, qui se concentre sur la compréhension globale des problèmes climatiques, plutôt que sur des données chiffrées.

De plus, l’atelier repose sur la collaboration. « Les gens vont travailler à plusieurs, se confronter, se tromper, s’apporter des choses et partager des expériences », explique M. Brard. Une stratégie qui porte fruit selon Ibrahim Charafaddine, étudiant en évaluation de programmes à l’École nationale d’administration publique au Québec. « Nous avons réalisé au fil du jeu que la problématique était complexe et nécessitait des actions concrètes dès maintenant pour éviter une catastrophe irréversible. »

Solution et engagements à l’Université Laval

Nous prenons ensuite le bus et nous dirigeons à 15 minutes de là, vers l’Université Laval, où les initiatives pour le climat sont nombreuses. Parmi celles-ci, figure le Réseau universitaire international pour l’action climatique (UniC). Il s’agit d’un réseau mondial d’étudiant.e.s impliqué.e.s dans la lutte pour le climat et qui a connu une importante évolution depuis sa création en septembre 2019, réunissant désormais 10 universités partenaires et près de 1000 membres étudiant.e.s. Stéphane Roche, directeur de l’Institut en environnement, développement et société de l’Université Laval, explique que cette initiative se distingue par sa nature bilingue et s’appuie sur une plateforme numérique novatrice. Celle-ci centralise les services et les interactions, offrant ainsi un espace unifié aux membres pour échanger et collaborer.

Pour lui, l’engagement des jeunes pour le climat est indéniable : « Les jeunes d’aujourd’hui sont plus conscient.e.s des enjeux climatiques dès leur jeune âge, les rendant plus enclin.e.s à prendre des mesures significatives. Les manifestations tangibles du changement climatique ont un effet direct sur leur quotidien, renforçant leur désir d’agir. »

Valériane Champagne St-Arnaud, professeure au Département de marketing de l’Université Laval, se spécialise dans le marketing responsable. À partir du trimestre prochain, elle dirigera un cours spécifique sur les changements climatiques intitulé « Communication marketing du climat ». Un sujet qu’elle connaît bien en raison de son axe de recherche. « Tous mes projets de recherche se concentrent sur cette thématique, notamment le baromètre de l’action climatique, une étude menée à l’échelle du Québec, permettant de saisir les croyances, attitudes et comportements des Québécois.es face à cette problématique. » Ce baromètre existant depuis cinq ans, elle a aussi contribué à une adaptation de celui-ci pour son établissement d’attache. « Nous avons aussi lancé une étude similaire à l’Université Laval pour dresser le portrait de la communauté universitaire en lien avec la question climatique. »

Sur la perception des étudiant.e.s concernant les enjeux climatiques, elle observe que dans sa faculté « certains cours suscitent un réel enthousiasme chez les étudiant.e.s, mais le sujet est moins présent dans certaines filières. La prise de conscience évolue, notamment avec des cours obligatoires sur le marketing responsable ».

Interrogée sur la nature de la communication marketing climatique, elle explique : « C’est l’application des techniques et théories de communication marketing à des enjeux sociaux tels que la lutte contre le tabagisme ou l’obésité, adaptées ici à la question climatique pour stimuler l’action auprès des citoyen.ne.s, entreprises et dirigeant.e.s politiques. »

Elle refuse cependant d’utiliser le terme sacrifice pour parler des adaptations nécessaires face aux changements climatiques. « Présenter ces changements comme des sacrifices peut décourager l’engagement. Je préfère voir cela comme une occasion de repenser notre qualité de vie et de promouvoir un avenir où réduire notre rythme de vie apporte des bénéfices. » Le GIEC confirme d’ailleurs que les changements climatiques sont une réalité tangible et une urgence imposée aux générations actuelles par les actions néfastes de celles qui les ont précédées.

« Les jeunes sont sensibilisé.e.s plus tôt au développement durable, mais il est crucial de présenter des solutions pour un avenir meilleur. L’écoanxiété, en particulier chez les jeunes, demande une approche équilibrée », conclut Mme Champagne St-Arnaud.

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