Sur les traces archéologiques de la grippe espagnole

Des chercheurs de l’UQAR évaluent le potentiel archéologique d’un site où des bûcherons ont succombé à cette maladie.

09 octobre 2018
Photo par M. Savard/Laboratoire d’archéologie et de patrimoine de l’Université du Québec à Rimouski.

Il y a presque 100 ans, dans une forêt située à une trentaine de minutes de route du village de Sainte-Irène, dans la Vallée de la Matapédia, un camp de bûcherons était frappé par la pandémie de grippe espagnole. Neuf des dix hommes succombèrent. Depuis, le lieu s’est transformé en site de commémoration où règne une atmosphère presque mythique. L’été dernier, Manon Savard et Nicolas Beaudry, chercheurs au Laboratoire d’archéologie et de patrimoine de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), ont sondé l’intérêt archéologique de l’endroit.

« Notre but n’était pas nécessairement de dénicher des artéfacts, mais plutôt de faire l’inventaire du potentiel archéologique et la description de l’état actuel des lieux et de son histoire », explique M. Beaudry.

Avec le temps, les bâtiments d’origine du camp ont disparu, et des visiteurs ont érigé des croix, une stèle et un autel auxquels sont accrochés de vieux outils, des instruments de cuisine et d’autres pièces qui rappellent la vie des bûcherons. On y trouve également des textes inscrits sur des panneaux de bois, dont un poème qui aurait été écrit par l’un des bûcherons.

Photo par Laboratoire d’archéologie et de patrimoine de l’Université du Québec à Rimouski.

« Nous avons donc des vestiges qui datent de deux époques, celle des bûcherons et celle après la pandémie », raconte Mme Savard.

Accompagnés de plusieurs étudiants, les chercheurs ont fait des battues pour dénicher, décrire et cartographier des objets ou des traces d’anciens bâtiments apparents en surface. Ils ont notamment trouvé une bouteille de gin, datée de 1910-1930, une vieille ambulance, les ruines d’une cabane de trappeur, un collier d’attelage de cheval, qui témoignent tous des diverses occupations du site. Ils ont également relevé les anomalies topographiques qui pourraient révéler la présence de structures. « Au centre du site, il n’y a plus grand-chose du camp original de bûcherons, car il a été trop remanié. Les vestiges se trouvent plutôt sur les pourtours du site, enfouis sous le sol forestier », précise la chercheuse.

Deux étudiants fait le catalogage d’une bouteille à gin. Photo de la laboratoire d’archéologie et de patrimoine de l’Université du Québec à Rimouski.

Lieu de mémoire

« Plusieurs récits entourent ce camp de bûcherons », signale M. Beaudry. L’équipe de recherche qui a rencontré plusieurs personnes de la région lors d’une journée archéologique « portes ouvertes » tenue sur le site s’intéresse d’ailleurs à la manière dont la mémoire et ces récits se sont construits à travers le temps, ainsi qu’au rapport qu’entretiennent les gens de la communauté avec ce camp de la grippe espagnole.

Interpellé par le projet, le maire de Sainte-Irène, Jérémie Gagnon, songe à installer un lieu commémoratif au centre de sa municipalité pour mieux faire connaître l’histoire aux résidents et, peut-être, attirer quelques touristes intéressés à visiter le camp de bûcherons.

En collaboration avec Moments Déterminants Canada, le projet a fait l’objet de capsules vidéo :

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