Des professeurs misent sur l’apprentissage par le jeu

Des étudiants profitent d’une expérience d’apprentissage rehaussée grâce au jeu et aux aspects interactifs et immersifs de la réalité virtuelle.

26 décembre 2018

Ce texte est un sommaire de l’article « Instructors explore game-based learning ».

Dans une salle de l’Université de la Colombie-Britannique, des étudiants en médecine affublés de casques à large viseur noir manipulent un grand hologramme de cerveau humain en trois dimensions qui flotte dans les airs. Comme dans un film de science-fiction futuriste, l’hologramme réagit instantanément à leurs commandes vocales et gestuelles en effectuant une rotation, en s’élargissant ou en isolant une image précise.

Cet outil d’enseignement, nommé HoloBrain, a été mis au point par les membres du laboratoire sur les médias émergents de l’Université de la Colombie-Britannique en collaboration avec des étudiants du programme de stage Microsoft Garage à Vancouver. Les chercheurs ont créé l’hologramme à l’aide d’une version modifiée du système optique HoloLens, lancé par l’entreprise en 2016 pour un jeu d’enquête interactif nommé Fragments. Claudia Krebs, chargée de cours principale à la Faculté de médecine de l’Université de la Colombie-Britannique, affirme que cette technologie offre aux étudiants un tout nouveau point de vue sur la structure interne du cerveau.

Ce cerveau holographique compte parmi les exemples les plus spectaculaires de l’intégration d’éléments de jeux vidéo à la mission éducative des universités canadiennes. Mais il y a aussi une foule d’étudiants qui s’adonnent à des jeux de rôle et accumulent des points lors de missions, qui participent à des simulations de haute technologie et qui réalisent pendant un semestre entier des projets au moyen de la réalité virtuelle.

Le HoloBrain. Photo de l’Université de la Colombie-Britannique.

Certains enseignants soutiennent que l’adoption d’éléments de jeu et de la réalité immersive peut offrir une expérience d’apprentissage plus stimulante aux étudiants. « Je crois que les jeux ont un immense potentiel éducatif », affirme David Kaufman, un professeur à la Faculté d’éducation de l’Université Simon Fraser qui a passé 20 ans à étudier l’apport des jeux et des nouvelles technologies numériques à l’éducation.

M. Kaufman explique que les jeux éveillent l’intérêt des étudiants et rendent les apprentissages plus mémorables que les exposés passifs. Malgré tout, il est d’avis que leur utilisation ne devrait pas être systématique. « C’est en quelque sorte l’épice qui rehausse une recette. Elle ne doit pas remplacer le plat en entier. »

Bon nombre des éléments ludiques utilisés par les enseignants modernes proviennent des jeux vidéo, la principale industrie créative du XXIe siècle. De plus en plus de recherches indiquent que les jeux vidéo peuvent susciter la créativité et l’innovation, en plus d’être fortement susceptibles de parfaire des compétences complexes comme la résolution de problèmes et la réflexion fondée sur des données probantes. Ces constats s’appliquent particulièrement à une nouvelle gamme de jeux sérieux qui sont conçus à des fins pédagogiques et non de divertissement.

On pourrait qualifier de sérieux le jeu pour téléphone intelligent Deteriorating Patient. Réaliste, mais peu technologique, celui-ci a été inventé par Jeffrey Wiseman, professeur de médecine à l’Université McGill, à l’intention des étudiants de quatrième année en médecine. L’application, conçue pour aiguiser les capacités de raisonnement et de prise de décision dans une situation clinique d’urgence, demande aux étudiants de stabiliser un patient souffrant alors qu’ils sont seuls dans une salle d’hôpital au beau milieu de la nuit. « Si le bon traitement n’est pas administré, l’état du patient se détériore et il finit par mourir », explique le Dr Wiseman, en ajoutant que les étudiants ont attribué une note élevée au jeu, même si certains l’ont trouvé « absolument terrifiant ».

Deborah Fels utilise des éléments de jeu dans deux de ses cours de gestion de la technologie à l’Université Ryerson, et donne à ses étudiants des points d’expérience plutôt que des notes. Elle publie un tableau des meneurs et propose un système économique virtuel dans lequel les étudiants au premier cycle peuvent acheter des avantages en accomplissant des tâches supplémentaires. « Je trouve que cette méthode offre plus d’indépendance et de pouvoir aux étudiants pendant le cours », souligne Mme Fels, qui est aussi directrice du centre du design et des médias inclusifs de l’Université Ryerson. Même si, de son propre aveu, rien n’indique que les étudiants obtiennent de meilleurs résultats dans les cours intégrant le jeu, ils semblent participer plus activement, et ils lui attribuent de meilleures notes dans ses évaluations, ce qui n’est pas pour lui déplaire.

À compter de janvier, les étudiants en médecine de l’Université Queen’s enfileront eux aussi un casque pour soigner des avatars malades lors de simulations en milieu hospitalier. « La réalité virtuelle nous donne la possibilité exceptionnelle de simuler avec réalisme une grande variété de situations cliniques, indique Dan Howes, professeur de médecine d’urgence et de soins intensifs et directeur du nouveau centre de simulation clinique. Nous voulons que les étudiants fassent leurs erreurs de débutants dans l’environnement virtuel plutôt qu’avec de vrais patients. »

Du côté de l’Université Ryerson, des simulations immersives inspirées des jeux vidéo sont utilisées pour améliorer la formation des étudiants en sciences infirmières. Dans un des scénarios virtuels, le joueur personnifie une infirmière qui assiste à l’examen prénatal d’une femme enceinte. À certains moments de la simulation, des décisions doivent être prises. La vidéo s’arrête alors et l’étudiant doit choisir la bonne réponse parmi plusieurs possibilités.

À la fin du scénario, l’étudiant reçoit une note et des commentaires. « Le jeu permet aux étudiants d’appliquer leurs apprentissages théoriques à un contexte psychologiquement et physiquement sûr », précise Jennifer Lapum, professeure à l’école de sciences infirmières de l’Université Ryerson.

Et pourtant, malgré l’immense intérêt de certaines de ces innovations inspirées des jeux vidéo, leur utilisation demeure partielle et ne dépend souvent que des compétences et de la volonté des professeurs. Le temps, les efforts et l’expertise technique qu’ils doivent déployer pour utiliser ces jeux comme outils d’apprentissage demeurent un obstacle à leur adoption à grande échelle.

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