Prendre sa retraite ou un nouveau virage?

Une professeure de l’Université York a choisi le terme « réorientation » pour refléter la nouvelle étape de la carrière qui suit la retraite dite traditionnelle.

28 juin 2017
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Les universitaires peuvent très bien continuer à travailler après 65 ans, mais l’heure de la retraite sonnera tôt ou tard. Pour Suzanne Cook, professeure à l’Université York, il n’est jamais trop tôt pour commencer à planifier une retraite active et productive.

« Autrefois, on imaginait la retraite comme dans les publicités de Liberté 55, où on voyait des gens marcher sur la plage ou s’asseoir dans un parc, l’air détendu. Cette vision ne correspond plus à la réalité. On réalise maintenant que la retraite peut durer des dizaines d’années », souligne-t-elle.

Professeure auxiliaire en sociologie à la faculté de la santé de l’Université York, Mme Cook étudie le vieillissement et les perspectives professionnelles depuis 10 ans. Pour décrire cette nouvelle étape qui suit la retraite dite traditionnelle, elle choisit d’utiliser le terme « réorientation ». Il s’agit pour elle d’une façon de modifier le paradigme, pour reconnaître que les compétences acquises au fil d’une carrière peuvent servir à la réalisation d’autres projets une fois à la retraite.

« Les universitaires réalisent de grandes choses et la plupart mènent de brillantes carrières. Certains sont si occupés et investis dans leurs activités professionnelles qu’ils en oublient de réfléchir à leurs projets de retraite. Leur rôle de professeur fait partie intégrante de leur identité. La transition peut être extrêmement difficile », poursuit-elle.

Elle ajoute que la plupart des universitaires sont si absorbés par leurs travaux qu’ils ne se rendent sans doute pas compte de l’étendue des compétences acquises pendant leurs années d’études. « Il faut prendre conscience qu’il y a une vie hors du milieu universitaire », déclare-t-elle.

Bien sûr, il n’est jamais trop tard pour se demander ce qu’on veut faire de sa retraite, mais pour Mme Cook, mieux vaut commencer tôt. Elle recommande aux moins de 50 ans de dresser une liste d’activités et de sujets qui les intéressent, mais auxquels ils n’ont pas le temps de se consacrer pour l’instant. Ils doivent se trouver des loisirs et des activités en parallèle à leur vie professionnelle. « Prenez le temps de pratiquer ces activités avant 50 ans, suggère-t-elle. Vous serez moins dépaysé le moment venu. » Il est important d’apprendre à se connaître; l’exploration est une étape cruciale du processus de réorientation.

À ceux qui n’ont pas encore de projets à l’aube de la retraite, Mme Cook recommande la même démarche, mais à brève échéance. En réfléchissant à ce qui les intéresse, les universitaires jettent des fondations sur lesquelles bâtir leur retraite. « Vous devez être attentif à ce qui vous inspire. Si vous prenez note de ces sources d’inspiration, vous pourrez y revenir en temps et lieu », croit-elle.

Elle cite le cas d’une collègue décontenancée par l’idée de prendre sa retraite, à qui elle a proposé d’élaborer un plan de réorientation. « Ça lui a pris trois ans pour se préparer à franchir cette étape importante. Elle a pris sa retraite en juin dernier. Elle s’est réorientée vers l’expertise-conseil et la formation auprès d’organismes à but non lucratif », explique-t-elle.

Mme Cook a produit un documentaire intitulé Redirection: Movers, Shakers and Shifters, dans lequel des retraités (dont un ancien universitaire) témoignent du virage qu’ils ont pris. Son film et ses travaux de recherche s’inscrivent dans le projet Se réorienter, que finance l’Institut canadien d’éducation et de recherche en orientation.

Elle donne aussi des conférences dans des universités, où elle parle de réorientation à des universitaires qui approchent de l’âge de la retraite. Selon elle, les universités pourraient offrir davantage de soutien et de services aux professeurs qui souhaitent se réorienter. « Ce peut être réjouissant de travailler sur son projet de réorientation, de mettre en place chaque élément pour entreprendre sa retraite du bon pied. Vous ne prenez pas votre retraite de quelque chose, mais bien vers quelque chose. Toutefois, les professeurs ne peuvent y arriver seuls, ils ont besoin des universités pour les renseigner sur les possibilités qui s’offrent à eux », pense-t-elle. À ses yeux, il est absolument essentiel d’obtenir du soutien pendant la réorientation.

Elle souligne qu’un grand nombre d’universitaires n’ont jamais eu à planifier ainsi leur parcours. « Par le passé, les choses se mettaient peut-être en place plus facilement. Les professeurs avaient moins à s’interroger sur les prochains défis à relever. »

C’est à ses grands-parents qui n’ont jamais cessé de contribuer à la société que Mme Cook doit l’inspiration derrière son projet de recherche. « Mon grand-père a su vieillir en santé de façon exemplaire. Il a vécu jusqu’à 99 ans. J’imagine que si je vis aussi longtemps, je devrai me réorienter encore et encore. Depuis 10 ans, dans le cadre de mes travaux, je vois des retraités se consacrer à quelque chose pendant cinq ou 10 ans avant de prendre un nouveau virage », conclut-elle.

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