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Responsabilités potentielles

Pour en finir avec les mythes : qu’est-ce que le postdoctorat?

Ni aux études, ni membres du corps professoral, les postdoctorantes et postdoctorants sont mal connus – pourtant, leur position à la croisée des différentes sphères universitaires leur confère un rôle névralgique.

par KATIE GEORGE | 30 AOÛT 24

Un postdoctorat, qu’est-ce que c’est?

On me pose souvent la question. Hors des universités (et encore), on semble voir les postdoctorantes et postdoctorants comme des créatures issues des contes et des légendes. Comme l’affirme l’Association nationale des postdoctorantes et postdoctorants sur sa page Web, « On doit mieux, bien mieux, faire connaître le postdoctorat. » La plupart imaginent une personne brillante, spécialiste de la recherche, qui est emprisonnée dans son laboratoire et ne voit la lumière du jour que pour rédiger des demandes de subvention.

La réalité est évidemment toute autre, même si, pour beaucoup de postdoctorantes et postdoctorants au Canada, c’est à s’y méprendre. Leurs travaux de recherche sont réalisés en vase clos et on ne les invite pas toujours à participer à la culture riche et diversifiée de leur établissement. Mais une postdoctorante ou un postdoctorant, qu’est-ce que ça mange en hiver?

Après avoir réussi sa soutenance de thèse, on peut vouloir continuer ses travaux de recherche au postdoctorat. La postdoctorante ou le postdoctorant, qu’on nomme aussi boursière ou boursier postdoctoral, ou encore chercheuse ou chercheur postdoctoral, a une expertise en recherche. Ces personnes travaillent pour le compte d’établissements canadiens, et leurs travaux de recherche stimulent l’innovation dans les milieux privés et universitaires. À noter que les paramètres (admissibilité, statut, lignes directrices) entourant le postdoctorat sont très hétéroclites. Prenons la question syndicale, par exemple, qui a une grande influence sur la réglementation et le cadre de travail. Dans certains établissements, les postes sont syndiqués; dans d’autres, non. Parfois, même si une association syndicale représente les postdoctorantes et postdoctorants, certaines facultés font exception. Ainsi, au sein du même établissement, deux personnes peuvent voir leur quotidien professionnel régi par des normes et règlements qui diffèrent.

Le postdoctorat dure d’un à cinq ans – il s’agit donc souvent d’un poste transitoire. Ces premières années professionnelles dans le milieu de la recherche sont chargées d’attentes : mentorat, supervision, publication d’articles et travaux de recherche.

Qui sont ces postdoctorantes et postdoctorants? Au Canada, leur âge moyen est de 25 à 54 ans et leurs profils sont parmi les plus diversifiés sur les campus… et ces personnes en passent du temps sur les campus! Leur semaine de travail compte en moyenne entre 45 et 60 heures, selon le dernier rapport d’enquête de l’Association Canadienne des Postdoctorantes et Postdoctorants (ACPP). À noter que ces heures varient en fonction de l’établissement et de l’unité de recherche.

Récemment, le gouvernement fédéral a reconnu l’importance des postdoctorantes et postdoctorants et a proposé pour mieux les soutenir de hausser le budget annuel des organismes subventionnaires pour faire passer la valeur des bourses postdoctorales de 50 000 $ à 70 000 $. Ces personnes indispensables sont sans aucun doute parmi les plus dévouées et travaillantes de nos établissements, et elles sont de mieux en mieux soutenues. Malgré tout, leurs fonctions restent grandement incomprises. Il est temps de déboulonner les mythes autour du postdoctorat pour mieux faire comprendre ce poste névralgique au milieu universitaire et au public.

Mythe : Faire un postdoctorat, c’est être aux études

Faire un postdoctorat, c’est porter plusieurs chapeaux : recherche, supervision, mentorat, rédaction, enseignement, etc. Dans plusieurs établissements canadiens, on fera partie du personnel. On enseigne, mais sans être du corps professoral. On nous associe aux étudiantes et étudiants des cycles supérieurs, mais on n’est pas aux études. Les postdoctorantes et postdoctorants sont « à cheval » ou « à la croisée des chemins » de plusieurs sphères universitaires, ce qui peut entraîner des amalgames et complexifier leur quête d’identité institutionnelle.

Mythe : Le postdoctorat, c’est une affaire de STIM

Les postdoctorantes et postdoctorants ne travaillent pas uniquement en science, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM). On les trouve dans tous les domaines et toutes les facultés, des sciences appliquées aux sciences humaines et sociales. Selon le dernier rapport de l’ACPP, la répartition était la suivante : 40 pour cent en sciences de la vie, 35 pour cent en sciences physiques et génie, et 10 pour cent en sciences sociales et humaines. À noter également qu’on en trouve aussi hors des universités et des laboratoires de recherche, par exemple dans des organismes de recherche ou des organismes d’État.

Mythe : On choisit cette voie pour accéder à la permanence

Le postdoctorat est souvent perçu comme une façon de faciliter la titularisation. Autrefois, ça avait du vrai. Cependant, les choses changent. Dans le dernier rapport de l’ACPP, on soulevait que les « tendances longitudinales indiquent que les postdocs de 2020 recherchent de plus en plus d’options de carrière en dehors de la filière de titularisation, ou options “alt-ac”, par rapport aux postdocs précédents. [Ces personnes ont conscience] des réalités du marché du travail et de la difficulté de trouver un emploi universitaire, et […] déclarent se montrer plus réalistes dans leurs objectifs de carrière au terme de leur postdoctorat. » Le postdoctorat ne garantit pas une éventuelle titularisation.

En résumé

Les postdoctorantes et postdoctorants jouent un rôle important. Leur expertise en recherche spécialisée aiguille toutes les sphères des milieux universitaires et commerciaux. Leur travail influence les politiques gouvernementales, leur encadrement guide la relève universitaire et leur éthique de travail impressionne. La prochaine fois qu’on vous demandera « À quoi sert le postdoctorat? », répondez simplement : à faire des travaux de recherche innovants qui ont le pouvoir de redéfinir l’avenir.

À PROPOS KATIE GEORGE
Katie George
Katie George est gestionnaire du programme d’enseignement et de leadership McCall MacBain pour les personnes au postdoctorat à l’Université McMaster.
COMMENTAIRES
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  1. Firmus / 30 août 2024 à 18:12

    On oublie souvent de dire que les postdoctorant.e.s sont des précaires qui permettent de faire fonctionner les universités à moindres frais. Eh oui, entre payer un.e prof 133 000$ par an (moyenne au Québec en 2022) et un.e postdoctorant.e entre 50 000 et 70 000$, c’est deux fois moins cher. Pour des personnes qui sont compétentes dans leur domaine (elles ont obtenu leur doctorat) c’est très peu cher payé, surtout après des années d’étude souvent sans financement et sans compter les difficultés psychologiques qui en découlent (beaucoup de doctorant.e.s vont mal, surtout depuis la COVID). En travaillant 60h semaine avec un tel niveau de responsabilité ce salaire est même une honte pour des personnes qui ont dû sacrifier leurs rêves de fonder une famille, d’acheter une maison ou un condo ou tout simplement d’avoir une vie stable.

    On nous fait croire que le postdoctorat est indispensable à la poursuite d’une carrière universitaire, mais c’est un mensonge. Une personne qui a obtenu un doctorat PEUT postuler à un poste de prof à l’université. Le postdoctorat n’est en rien obligatoire. A l’origine, il s’agissait de contrats courts en attendant d’obtenir un poste de professeur. Ce n’est plus le cas aujourd’hui où les places sont rares et les demandes nombreuses. On agite alors la carotte d’un poste pour les candidat.e.s si ceux ou celles-ci acceptent de faire un postdoctorat mal payé et pas toujours dans leur ville ou leur pays d’origine ! Et gare à la personne qui osera dénoncer ses conditions de travail déplorables et le fait qu’elle est exploitée : la porte sera souvent montrée et d’autres personnes seront là pour prendre sa place.

    Évidemment que beaucoup de personnes qui débutent un postdoctorat à l’université regardent du côté du privé. L’état de la recherche publique est aujourd’hui si déplorable que seul le privé permet d’accéder à un salaire décent après tant d’années d’études.