Le bien-fondé des « thérapeutes
canins » sur nos campus universitaires
Le programme B.A.R.K. offre aux étudiants et membres de la communauté de passer du temps avec des chiens thérapeutes.
Cet article a été publié à l’origine sur le site Web The Conversation. Lisez le texte original.
C’est le même scénario à chaque fois. Je quitte mon bureau, traverse le campus à la recherche d’un café, mon chien Frances à mes côtés. Je me retrouve alors assiégé par des étudiants qui pour la plupart m’ignorent royalement, absorbés par Frances. Quand ils relèvent la tête, leurs yeux remplis de larmes, ils me disent : « Autant mes parents me manquent, c’est mon chien qui me manque le plus. »
Sept ans plus tard, je dirige un grand département de thérapie canine à l’Université de la Colombie britannique. Soixante équipes de « thérapeutes canins » proposent aux étudiants des programmes visant à réduire leur stress et à améliorer leur bien-être.
Le programme B.A.R.K. (Building Academic Retention through K9s), est un programme de zoothérapie visant à lutter contre le décrochage. Il offre aux étudiants et membres de la communauté de passer du temps avec des chiens thérapeutes.
Un programme sans rendez-vous est offert tous les vendredis après-midi. Pour ceux qui ne peuvent pas participer à cette session, nous offrons des équipes de thérapie canine sur le campus, situés stratégiquement près du café et, à d’autres moments, à la bibliothèque.
Nos 60 chiens de thérapie sont principalement des mâles d’environ quatre ans. Le tiers environ sont des mélanges, ce qui récuse le stéréotype dominant selon lequel seuls les Golden Retrievers sont de bons chiens de thérapie.
Nous travaillons en étroite collaboration avec un refuge local pour animaux, « Paws it forward », qui sauve des chiens abandonnés risquant la mort aux États-Unis et ailleurs. Une fois adoptés, beaucoup d’entre eux se retrouvent dans notre programme.
Pourquoi des chiens sur le campus?
On considère généralement que la vie d’un étudiant universitaire est une étape excitante et attrayante. Mais pour beaucoup, dont les étudiants étrangers, la vie sur le campus peut ressembler à un déménagement en maison de retraite, puisqu’on ressent l’éloignement, l’abandon de sa famille et de ses animaux, et l’adaptation à une institution potentiellement impersonnelle.
De fait, les étudiants de première année universitaire, tout particulièrement durant leur premier semestre, éprouvent un niveau élevé de mal du pays. Leur fournir des « chiens thérapeutes » les aident à combler le vide causé par ce bouleversement et facilite leur transition de l’école secondaire (ou du cégep dans le cas du Québec) à l’université.
Les étudiants de première année doivent s’ajuster à des attentes académiques plus élevées et trouver une façon de se créer de nouveaux réseaux sociaux. Soudainement libérés de la tutelle familiale, il peuvent soit nager comme un poisson dans l’eau ou avoir l’impression de s’y noyer.
Les universités recherchent de plus en plus de solutions de soutien à ceux, parmi leurs étudiants, qui ont besoin d’aide pour cette transition. Les universités modernes ne sont plus seulement soucieuses des résultats académiques de leurs étudiants, mais aussi de leur bien-être social et émotionnel.
Les étudiants qui échouent à accomplir la transition du secondaire à l’université risquent de voir leur santé mentale compromise, et possiblement d’abandonner leurs études, ce qui est un échec non seulement pour l’étudiant mais également pour l’université.
D’où l’intérêt des chiens de thérapie sur les campus. Une étude datant de 2015 a identifié plus de 925 programmes de thérapie canine sur les campus des collèges américains, mais à ce jour il n’existe aucune recherche exhaustive sur les thérapies canines dans les établissements postsecondaires au Canada.
Après sept années ici, voici ce que j’ai appris du soutien aux étudiants à l’aide de la thérapie canine.
1. S’assurer du bien-être des chiens
Mettre en présence un groupe de chiens de thérapie et des étudiants stressés n’est pas une sinécure, et il faut s’assurer de protéger et d’assurer le bien-être des chiens durant les séances.
On ne peut réduire le stress d’un humain aux dépens du bien-être du chien thérapeute. C’est pourquoi les chiens qui font partie de notre programme sont soigneusement observés afin de repérer les symptômes de stress. Dans leur programme d’orientation, nous apprenons aux maîtres-chiens à reconnaître les symptômes du stress canin.
2. S’entourer de chiens abaisse le niveau de stress des étudiants
Sur une période de trois semestres, nous avons documenté l’auto-évaluation confidentielle faite par 1960 étudiants sur leur niveau de stress, avant et après avoir suivi le programme canin, et ce, sur une période de trois semestres. Nous avons constaté une réduction significative du niveau de stress qui est passé d’une moyenne de 4,47 sur une échelle de 5 au début du programme à 1,73 en fin de programme..
3. La demi-heure magique
Certains programmes limitent le temps que les étudiants peuvent passer auprès des chiens.
Cependant, nous avons pu observer que lorsqu’on leur donne l’option de rester jusqu’à ce qu’ils estiment que leur niveau de stress ait suffisamment baissé, les étudiants passaient en moyenne 35 minutes auprès de l’animal.
4. La thérapie canine peut être économique
Malgré le défi logistique que représente une thérapie canine, il est possible de la mettre en place à un coût raisonnable à condition de la structurer correctement.
Les coûts de ce programme se trouvent surtout en amont durant le processus de sélection, de formation et d’évaluation des chiens et des maîtres-chiens. Du fait que ces programmes reposent en grande partie sur les efforts des bénévoles de la communauté, les coûts ne sont pas prohibitifs une fois les équipes constituées.
5. Les programmes doivent être flexibles
L’accès aux chiens ne peut faire l’objet de trop d’obstacles. Les étudiants, spécialement ceux qui sont stressés, n’aiment pas attendre. C’est un défi que de donner accès à suffisamment de chiens pour satisfaire à la demande.
6. Ce n’est pas que pour les étudiants de première année
Bien que la majorité des étudiants qui nous rendent visite soient de première année, nous en rencontrons de l’ensemble du premier cycle. En général, plus de filles que de garçons ont recours à la thérapie canine.
Nous constatons également que des membres de la communauté, tout comme le corps professoral, font usage de nos programmes. Bien que les membres du corps enseignant, particulièrement au niveau postsecondaire, font face à un stress professionnel élevé, nous n’avons pas encore évalué l’impact de la thérapie canine sur les niveaux de stress du personnel enseignant ou administratif.
À notre espace en « libre-service », vous trouverez des friandises, des maîtres-chiens amicaux formés à la facilitation des interactions, de même que des chiens thérapeutes qui s’empresseront de réconforter ces étudiants qui avouent que leur chien leur manque un peu plus que leurs parents…
John-Tyler Binfet est professeure agrégé à la Faculté d’éducation à l’Universite de la Colombie-Britannique.
Postes vedettes
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
Laisser un commentaire
Affaires universitaires fait la modération de tous les commentaires en appliquant les principes suivants. Lorsqu’ils sont approuvés, les commentaires sont généralement publiés dans un délai d’un jour ouvrable. Les commentaires particulièrement instructifs pourraient être publiés également dans une édition papier ou ailleurs.