Le libre accès : reprendre les choses en main
Le moment est venu de prioriser les infrastructures ouvertes pour que le libre accès progresse réellement au Canada.
Ces lignes ne constituent pas un énième article d’opinion sur la nécessité du libre accès. Elles soulignent plutôt les entraves au libre accès pour la communauté de recherche, particulièrement le manque d’investissement dans les infrastructures ouvertes.
Le Canada possède tout le nécessaire pour développer un système de publication en libre accès à la fine pointe de la technologie, équitable, pérenne et entre les mains de la communauté scientifique. Le pays est aussi bien placé pour élaborer une stratégie nationale pour le libre accès diamant, un modèle gratuit à la fois pour le lectorat (aucuns frais d’abonnement) et pour les autrices et auteurs (aucuns frais de publication ou APC [Article Processing Charges]).
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Le Canada a la chance de posséder deux infrastructures ouvertes pour la diffusion des travaux de recherche : le Public Knowledge Project (PKP), qui développe des logiciels gratuits de publication savante utilisés par des dizaines de milliers de revues dans le monde entier, et Érudit, qui gère la plateforme de diffusion de la recherche la plus importante au pays. Les deux infrastructures, chacune associée à une université canadienne, ont fondé le partenariat Coalition Publica afin de faire progresser leur mission commune, celle d’encourager le libre accès au Canada. Avec l’aide de nombreuses revues et bibliothèques, ce partenariat fait la promotion d’un modèle de libre accès équitable aux excellentes publications scientifiques du pays, dans les deux langues officielles.
Coalition Publica tire notamment sa force de ses partenariats interprovinciaux. La bibliothèque de l’Université de l’Alberta, par exemple, coordonne un programme de publication très actif qui appuie les revues universitaires en libre accès. En collaboration avec Érudit et PKP, elle utilise l’infrastructure développée par Coalition Publica pour diffuser les revues en libre accès et faciliter l’accès aux fonds du Partenariat pour le libre accès – un projet qui offre du soutien financier aux revues savantes non commerciales grâce à des bibliothèques partenaires. Tout le monde en profite : la bibliothèque de l’Université se sert de l’infrastructure pour ses activités de publication, les revues bénéficient d’une visibilité accrue et d’une aide financière, les bibliothèques de recherche canadiennes offrent un accès libre aux revues, et les chercheuses et chercheurs ont plus d’options pour publier gratuitement leurs travaux.
Mais comment fournir à cette infrastructure non-commerciale toutes les ressources dont elle a besoin pour prospérer dans le milieu de l’édition actuel? Coalition Publica est surtout financée par des subventions gouvernementales temporaires et administrativement lourdes. Les fonds sont difficiles à obtenir, même si le montant requis ne représente qu’une fraction des dépenses engagées par les bibliothèques pour l’abonnement à du contenu payant et la conclusion d’ accords transformatifs, où les frais de publication sont payés d’avance pour que les articles soient diffusés en libre accès à leur parution.
Autre paradoxe : nous mettons en péril la pérennité des infrastructures ouvertes que nous avons bâties et entretenues pour la communauté… tout en investissant davantage dans le contenu payant chaque année. Pourquoi le libre accès devrait-il se contenter des fonds de tiroir, alors qu’il s’agit d’un enjeu prioritaire?
Plus nous attendons, plus il sera difficile de passer des ententes commerciales aux investissements collectifs non commerciaux. Les accords transformatifs – qui accaparent le budget des bibliothèques et sont très contraignantes – n’inciteront probablement jamais les éditeurs commerciaux à offrir des revues en libre accès. De plus, ces accords valident les modèles de libre accès reposant sur les APC et, par ce fait même, excluent les chercheur·euses affilié·es à des établissements qui ne les ont pas signés ou qui n’ont pas les fonds leur permettant de payer ces frais de publication, qui peuvent s’élever jusqu’à 10 000$ par article. Or, on continue d’accepter ce modèle, parce que sa structure transactionnelle est familière et qu’elle s’intègre bien aux systèmes établis.
Il faut cependant investir dans une stratégie de libre accès équitable et pérenne. Lors de récentes consultations sur une nouvelle politique de libre accès pour la recherche financée par le gouvernement fédéral, les organismes subventionnaires du Canada ont noté un intérêt marqué pour le modèle diamant. Établir des modèles de libre accès éthiques menés par des membres du milieu universitaire s’avère une nécessité criante.
Sachant que les bibliothèques ne pourront résoudre seules cet épineux problème, nous demandons à toutes les parties prenantes de collaborer à l’élaboration d’une stratégie nationale d’investissement dans le libre accès et les infrastructures ouvertes. Ensemble, faisons de la recherche un bien commun.
L’avenir du libre accès commence aujourd’hui. Les actions collectives des prochaines années ouvriront la voie. On pensait que le changement viendrait des accords transformatifs; il est maintenant clair qu’elles ne suffisent pas. C’est le moment où jamais pour le Canada d’explorer le libre accès diamant : les structures d’investissement collaboratif sont déjà en place. La création de consortiums nationaux et provinciaux de bibliothèques visant à améliorer l’accès au contenu numérique a jeté les bases d’une collaboration transformatrice. Les outils et la capacité nécessaires pour façonner l’avenir de l’accès au savoir sont là; il ne manque que les investissements pour le concrétiser.
Postes vedettes
- Médicine - Poste facultaire (santé du rein)Université de Montréal
- Psychologie - Professeure ou professeur (enjeux socio-environnementaux, section sociale et personalité)Université du Québec à Montréal
- Études autochtones - Professeur ou professeureUniversité Laval
- Génie - Professeur adjoint / professeure adjointe (génie civil / géotechnique)Université McGill
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
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