À une époque où l’attention humaine est difficile à capter plus que quelques secondes, notamment chez les jeunes qui sont soumis à des tonnes de stimulus, l’organisation de quatre fins de semaine de vulgarisation scientifique peut sembler téméraire. Pourtant, l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) a réussi ce tour de force pour une deuxième année consécutive à l’Aquarium du Québec.
Au cours du mois d’octobre dernier, des centaines de jeunes ont ainsi profité de la présence des chercheurs et chercheuses de l’INRS, installé.e.s quelque part au milieu des poissons et animaux de l’Aquarium. Les personnes qui l’ont visité pendant cette période ont donc pu en apprendre davantage sur divers thèmes liés à la pollution de la planète.
Les activités leur permettaient notamment de pêcher des déchets de plastique dans un cours d’eau afin de mieux comprendre les conséquences environnementales de ce polluant ou de récolter des séquences d’ADN, dans l’eau, avant de les assembler dans l’ordre sur la terre ferme.
« Ce sont des activités de base, c’est grossi par rapport à ce qu’on fait en laboratoire », explique Valérie Langlois, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en écotoxicogénomique et perturbation endocrinienne et responsable scientifique du Laboratoire de l’INRS sur le même sujet. « Les jeunes embarquent rapidement en touchant et manipulant. C’est un chaos organisé, et on fait ça volontairement. Les jeunes ne sont pas dans un contexte scolaire et n’ont pas besoin d’attendre pour apprendre, nos scientifiques sont là pour leur répondre », résume celle qui chapeaute le projet avec trois confrères de l’INRS.
Un chaos organisé et payant en termes d’apprentissages
Outre la vulgarisation à proprement parler, l’exercice a effectivement aussi l’avantage de favoriser les échanges intergénérationnels, ce qui n’est pas anodin en contexte scientifique. Les connaissances partagées sont relativement de base, vrai, mais uniquement d’un point de vue adulte (et scientifique!). Les jeunes et moins jeunes n’ont pas la même expérience, les mêmes connaissances, pas plus que les mêmes interrogations.
« Peu importe le groupe d’âge, il y a un travail d’adaptation à faire », précise Julie Couillard, associée de recherche qui a pris part aux ateliers. « Il faut absolument trouver l’angle qui va captiver. On a l’habitude de parler entre scientifiques de nos enjeux bien précis au quotidien, alors ça nous demande un effort de revenir à des explications accessibles pour tout le monde », ajoute-t-elle au sujet de ce défi de communication. « Un défi des plus agréables à relever », a-t-elle tenu à préciser. « Je suis déjà heureuse qu’ils nous choisissent, et non les animaux de l’Aquarium. Moi, à leur âge, je serais plutôt allée voir les pingouins! »
« Les étudiant.e.s deviennent les professeur.e.s, et il s’agit bien souvent de leur premier contact avec le monde de l’enseignement. Il y a même des étudiant.e.s pour qui le français n’est pas la première langue », précise de son côté Mme Langlois. Celle-ci estime d’ailleurs que la jeunesse des chercheurs et chercheuses en début de carrière représente un avantage. « Leur message passe mieux que par les chercheurs et chercheuses avec beaucoup d’expérience en raison de la relative proximité en âge. Dans tous les cas, un peu comme moi, je crois que ça leur donne de l’énergie pour continuer. On constate sur le terrain que le partage des connaissances est utile et nécessaire. »
Des sujets cruciaux
Ce partage de connaissances, comme le souligne Mme Langlois, est également devenu, en quelque sorte, plus « facile » avec les années. « Les thématiques liées à l’environnement sont partout dans les médias, on entend parler de pollution tous les jours. Probablement que la population est davantage captive lorsque vient le temps de se pencher sur le problème et ses solutions », convient Mme Couillard.
Des propos qui rejoignent Valérie Langlois. « Le domaine de recherche est intéressant pour monsieur et madame tout le monde. Les problématiques touchant les animaux, le plastique et les pesticides, le public est sensible à ça, mais il cherche des réponses. C’est donc l’une des missions de l’INRS, de rendre les chercheurs et chercheuses disponibles, de poursuivre une mission publique », ajoute la chercheuse.