Des universitaires au poing levé

Des poèmes signés par des universitaires franco-ontariens dénoncent les compressions budgétaires de 2018 en Ontario.

25 septembre 2019

Un recueil de poèmes métissés, conçu en réaction aux compressions amputant la francophonie ontarienne à l’automne 2018, c’est bien là la source de Poèmes de la résistance. À travers la diversité de ses 37 auteurs – parmi lesquels figurent plusieurs universitaires – la bien nommée maison d’édition Prise de Parole a voulu rendre compte de l’indignation franco-ontarienne et de sa force créative.

L’idée est née d’un premier poème publié sur les réseaux sociaux, puis le concept a tissé sa toile dans un recueil collectif plus structuré. « La poésie, ça se lit, ça se dit, c’est un moyen d’accès direct. Il fallait dire la lumière de notre colère », explique Stéphane Cormier, codirecteur de la maison d’édition sudburoise.

Son appel à textes n’a eu aucun mal à rejoindre toute une communauté littéraire, énième preuve que la solidarité franco-ontarienne n’a pas attendu sa journée attitrée pour se mobiliser.

« En tant que défenseur de la littérature, quand j’ai senti ce désaveu du gouvernement ontarien pour l’Ontario français, je me suis rallié sans hésiter », reconnaît d’emblée l’écrivain Thierry Dimanche – connu sous le nom de Bissonnette par ses étudiants à l’Université Laurentienne. « Cela signifiait s’engager sans que ce soit strictement politique », résume-t-il, soulignant aussi le danger « de cesser d’être poétique pour être platement politique ».

Sylvie Bérard, auteure et professeure de littérature à l’Université Trent, confirme l’intérêt du monde universitaire, directement concerné par la menace des droits linguistiques. Elle signe Entre l’oméga, un poème baladeur au carrefour des routes ontariennes et des voies de résistance. « La poésie permet de dire beaucoup en peu de mots et de se concentrer sur le
sens », analyse-t-elle.

L’auteure Sylvie Bérard a notamment remporté en 2018 le Prix de poésie Trillium pour son recueil Oubliez. Crédits : Sylvie Bérard et Suzanne Grenier.

Loin de l’image élitiste et passéiste qui colle à ce genre littéraire, la poésie a le pouvoir de rendre compte des bruissements du monde, aussi sensible à l’actualité et à l’universel.
« L’oméga est le symbole de la fin, mais j’ai plutôt voulu aborder la menace d’une fin », précise la professeure, une semaine après la signature de l’entente entre le gouvernement fédéral et celui de l’Ontario pour le financement et l’établissement de l’Université de l’Ontario français (UOF).

Ces derniers temps, les combats franco-ontariens se sont surtout cristallisés autour de la création de cette université. Or, la volonté d’étudier en français en Ontario, Mme Bérard la constate immanquablement aux journées portes ouvertes de son établissement. « À l’extérieur d’Ottawa et de Sudbury, ça reste difficile de recevoir un enseignement en français, déplore-t-elle, et plus difficile encore si la discipline ne concerne pas la littérature francophone. »

Les avancées du projet de l’UOF ne rendent pas caduc le recueil, loin de là, considère Stéphane Cormier : « Peut-être que dans 10 ans, cet ouvrage collectif restera comme une photographie du temps de la contestation. » Au conditionnel, donc.

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