Pourquoi les universités doivent déclarer l’état d’urgence écologique et climatique
De plus en plus d'établissements déclarent l'état d'urgence pour préparer personnel et étudiants à des temps plus difficiles.
Cet article a été publié à l’origine sur le site Web La Conversation. Lisez le texte original.
Les universités s’enorgueillissent de préparer leurs étudiants à un avenir brillant. Mais face à un climat en crise, où les catastrophes d’une ampleur et d’un impact « sans précédent » deviennent la norme, à quel avenir promettre nos étudiants ? Face à la dégradation de l’environnement et à la perte très importante de biodiversité, les universités et autres établissements d’enseignement devraient prioriser la préparation adéquate de leurs étudiants et de leur personnel à des temps de plus en plus difficiles.
Les changements climatiques et la destruction de l’environnement affectent tous les aspects de la vie, y compris ce dont nous avons le plus besoin ou ce à quoi nous tenons le plus : l’eau, la nourriture, les écosystèmes, la faune, la sécurité, le logement, l’énergie, les transports, la santé, les collectivités et l’économie. Les besoins humains fondamentaux de nombreuses personnes, en particulier les plus vulnérables, sont déjà menacés.
Affronter les conflits induits par le climat, les migrations massives, les effets sur la santé, les coûts économiques et la dégradation de l’environnement représentent des défis d’une ampleur extraordinaire. Il n’y a tout simplement pas de plus grand défi que d’affronter l’urgence écologique et climatique : les universités doivent à leurs étudiants d’être à l’avant-garde de ces questions.
Des étudiants inquiets pour leur avenir
Par les voix de Greta Thunberg, des grèves scolaires pour le climat et des « Fridays for the future », des jeunes du monde entier appellent haut et fort à un changement de société. Des pancartes de protestations émergent partout : « Pourquoi étudier pour l’avenir alors que personne ne fait assez pour sauver notre avenir ? », « Le changement climatique est pire que les devoirs », « si vous n’agissez pas comme des adultes, nous le ferons », ou encore « le climat change, pourquoi pas nous ? »
Les universités ont un rôle particulier à jouer pour la planète. En tant que grands établissements, leur empreinte carbone et environnementale est importante, ce qui devrait constituer en soi une incitation suffisante pour agir. Mais il leur incombe également la responsabilité d’être honnêtes avec leurs étudiants, car les emplois qu’ils chercheront après leur diplôme seront fondamentalement remodelés par un climat de plus en plus variable et par certains extrêmes climatiques sans précédent par leur intensité et leur fréquence.
En tant qu’établissements d’enseignement, les universités ont par ailleurs un potentiel inégalé. Plusieurs millions d’étudiants à travers le monde obtiennent leur diplôme chaque année. Ils sont et seront de plus en plus touchés par les changements climatiques. L’humanité a besoin de citoyens engagés qui comprennent les innombrables implications des perturbations climatiques et peuvent y faire face dans l’urgence.
Des établissements déclarent l’urgence climatique
Le défi climatique exige la collaboration de penseurs créatifs et critiques, de communicateurs et de spécialistes des problèmes à résoudre, de leaders et de collaborateurs, d’entrepreneurs et de chercheurs, de scientifiques et de philosophes.
C’est une crise civilisationnelle et existentielle. Le partage et la production des connaissances devraient être massivement orientés en ce sens. Toutes les disciplines universitaires doivent tenir compte des défis de l’incertitude face à un climat en évolution.
Plusieurs établissements, telles que la Southern Connecticut State University aux États-Unis, les universités de Bristol, Exeter, Glasgow et Lincoln ainsi que les universités de Keele et Newcastle au Royaume-Uni et l’Université polytechnique de Catalogne en Espagne ont déjà déclaré une urgence climatique.
Ces universités ouvrent la voie aux côtés de millions de jeunes dans le monde, de gouvernements locaux et nationaux et du secteur privé.
Plus qu’une démonstration symbolique, la déclaration d’une crise environnementale et climatique a de réelles implications.
Diminuer leur empreinte carbone
En tout premier lieu, cela implique de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et leur empreinte écologique. Les universités se fixeraient en la matière des objectifs transparents, en seraient tenues responsables et en rendraient compte régulièrement.
En adoptant des pratiques durables dans tous les aspects de leur fonctionnement, de la restauration au transport et aux déplacements, en passant par les investissements, la conception et l’entretien des bâtiments ou la gestion des déchets et de l’énergie, entre autres, les universités tendraient à devenir plus durables sur le plan environnemental et serviraient d’exemple aux autres organisations.
S’adapter aux impacts du changement climatique
Afin de s’adapter au changement climatique, les universités doivent mettre en place des mesures pour s’assurer que leurs étudiants, leur personnel et leurs visiteurs sont au mieux préparés aux risques et aux impacts liés au climat : inondations, vagues de chaleur, pénurie d’eau, cyclones tropicaux, feux de brousse, ainsi que les troubles sociaux, le déclin de la productivité et les conséquences sur la santé qui résulteront inévitablement du fait de la détérioration de notre climat.
Il est tout aussi important de préparer les étudiants à être réceptifs aux nouvelles possibilités qui peuvent se présenter à certaines périodes dans certaines régions en raison des changements climatiques.
Intégrer le changement à toutes les disciplines
Pour cela, il est indispensable d’intégrer l’action écologique et climatique à toutes les disciplines. Les universités veilleraient à ce que tous les étudiants, quels que soient leur discipline et leur niveau d’études, comprennent les impacts climatiques spécifiques et les mesures correctives possibles.
Cela se refléterait dans les programmes d’études, les classements des universités, les attributs des diplômés, ainsi que dans les mesures du rendement du personnel, y compris celles des cadres supérieurs.
Les activités interdisciplinaires d’enseignement et de recherche sur les défis environnementaux mondiaux, la résilience et les solutions seraient prioritaires et feraient l’objet d’investissements. L’action collective, l’engagement communautaire, les partenariats, le partage des meilleures pratiques et les plates-formes ouvertes pour l’innovation seraient encouragés.
Un appel à toutes les universités
L’ampleur des défis qui attendent l’humanité exige des dirigeants courageux et engagés, des investissements dévoués, une transformation organisationnelle et structurelle et, surtout, des changements fondamentaux dans les comportements économiques et humains. Les universités ont un rôle vital à jouer pour s’assurer que l’augmentation de la température mondiale reste inférieure à 1,5 °C, et elles devraient s’y employer résolument.
Inspirés par notre jeunesse, nous appelons les cadres universitaires, les membres du conseil d’administration, le personnel universitaire et non universitaire, ainsi que les étudiants à déclarer l’état d’urgence écologique et climatique. Il n’y a pas de plus grand enjeu pour l’avenir de l’humanité et le moment est venu d’en déclarer l’urgence.
Jean S. Renouf est chargé de cours en politique et relations internationales, Southern Cross University et Jean Jouzel est directeur émérite de recherche au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement (CEA-CNRS-UVSQ)/Institut Pierre Simon Laplace, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) – Université Paris-Saclay.
Ont aussi participé à l’écriture de cet article : Michael E. Mann (Penn State University), John Cook (George Mason University), Christopher Wright (University of Sidney), Will Steffen (Australian National University), Patrick Nunn (University of the Sunshine Coast), Pauline Dube (University of Botswana), Stephan Lewandowsky (University of Bristol), Anne Poelina (University of Notre-Dame Australia), et Katherine Richardson (University of Cambridge) sont co-auteurs de cet article.
Postes vedettes
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
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