Des dispositifs de suivi de pointe dévoilent les secrets de la nature
Les drones, la géolocalisation et d’autres outils de pointe permettent aux chercheurs de suivre des animaux particulièrement difficiles d’accès dans leurs habitats naturels.
Les images sont saisissantes. Tournées par un véhicule aérien sans pilote, elles montrent des orques qui nagent côte à côte dans les eaux émeraude de la côte Ouest du Canada. Dans la vidéo, une mère pousse du bout du museau son petit qui, en retour, se laisse glisser le long de son corps avant de lui donner, joueur, un coup de queue sur la tête. Grâce à ce genre d’images, les scientifiques peuvent observer de près les comportements des orques résidentes du Sud, une espèce en voie de disparition.
« Pour pouvoir aider ces baleines, nous devons en savoir plus sur elles, sur leur façon de chasser et sur les endroits où elles se nourrissent », explique Andrew Trites, directeur et responsable de projet à l’unité de recherche sur les mammifères marins de l’Institut des océans et des pêches de l’Université de la Colombie-Britannique. « Les drones nous permettent, tels de petits oiseaux, de les observer dans un cadre entièrement naturel. »
Et ce n’est qu’un exemple de la manière dont les outils novateurs de haute technologie transforment radicalement l’étude de la faune. Encore récemment, les biologistes ne pouvaient compter que sur leur crayon et leur cahier de notes sur le terrain. Aujourd’hui, ils ont accès à une foule de merveilles, comme de minuscules transmetteurs pouvant retracer le trajet migratoire d’oiseaux chanteurs; des pièges photographiques captant des images d’animaux dans leur habitat autrement inaccessible; et des étiquettes de repérage par satellite, permettant de suivre les déplacements des mammifères marins, leurs activités de chasse ainsi que la profondeur, la température et la salinité des eaux où ils nagent.
Ces données précieuses mènent à des découvertes importantes qui améliorent la prise de décisions en matière de faune et de gestion des habitats, et aident à protéger les populations menacées dans un monde de plus en plus peuplé, développé et divisé. Comme M. Trites le souligne, « la technologie nous donne accès à de l’information inédite ».
Même les animaux les plus difficiles d’accès révèlent désormais leurs secrets. Dans les forêts enneigées du Yukon, des chercheurs de l’Université Trent, de l’Université McGill et de l’Université de l’Alberta utilisent des outils de pointe pour étudier le lynx du Canada, un animal si insaisissable que même certains chasseurs chevronnés n’en verront jamais de leurs yeux.
Les individus capturés par les chercheurs sont endormis et équipés d’un collier GPS qui suivra leurs déplacements, d’un accéléromètre qui déterminera leur niveau d’activité, et d’un moniteur d’activité qui trace leurs mouvements dans toutes les directions. Tous les trois mois environ, ces appareils sont retirés à distance, puis récupérés afin d’en télécharger les données.
L’information captée est très précise. « Nous pouvons savoir si le lynx marche, se repose, mange ou fait sa toilette », explique Rachael Derbyshire, doctorante au programme des sciences de l’environnement et de la vie à l’Université Trent. Un enregistreur acoustique permet en outre à l’équipe d’entendre les interactions du lynx avec d’autres animaux, et même le son qu’il fait en attrapant et mangeant sa proie favorite, le lièvre d’Amérique.
À vol d’oiseau
Les avancées technologiques ont aussi révolutionné l’étude de la migration des oiseaux. Pendant des décennies, la télémétrie satellitaire était l’option par excellence pour suivre ces animaux, mais le plus petit des capteurs pesait autour de 10 grammes, ce qui était bien trop lourd pour la grande majorité des oiseaux. L’invention du géolocalisateur a tout changé. Ce dispositif alimenté par pile est plus léger qu’un petit trombone. Il renferme un capteur qui enregistre des données générales à intervalles réguliers afin de reconstituer toute la route migratoire de l’oiseau qui le porte. L’inconvénient est qu’il ne peut transmettre les données, et qu’il doit donc être récupéré directement sur l’oiseau. Heureusement, la plupart des oiseaux chanteurs sont fidèles à leur site de nidification et y reviennent chaque année.
Les renseignements recueillis sur les habitudes migratoires jouent un rôle crucial dans la conservation des oiseaux chanteurs, qui ont vu leurs populations chuter ces dernières années. Avant l’avènement des géolocalisateurs, les biologistes en savaient très peu sur ce qu’il advenait de ces oiseaux durant les sept à huit mois de leur migration ou leur séjour plus au sud. Heureusement, la situation évolue rapidement.
Ainsi, des scientifiques ont récemment résolu une controverse de longue date concernant la paruline rayée, un oiseau chanteur affichant un des déclins les plus rapides au Canada. Personne ne savait où elle allait entre son départ de la forêt boréale à l’automne et son arrivée dans le bassin amazonien. Ryan Norris, professeur agrégé au Département de biologie intégrative de l’Université de Guelph, a découvert que ce petit oiseau d’à peine 12 grammes (soit moins que le poids de deux pièces d’un dollar) s’envole vers les Maritimes avant de bifurquer vers le sud pour un vol ininterrompu de 62 heures au-dessus de la partie occidentale de l’océan Atlantique. Il se pose ensuite quelques jours dans les Caraïbes, avant de reprendre sa route jusqu’au Venezuela.
« Il s’agit du plus long survol maritime au monde par un oiseau de cette taille », affirme M. Norris. Et, fait encore plus remarquable, il a appris que les parulines nichant près de Nome, sur la côte de l’Alaska, repoussaient les limites de l’endurance jusqu’à parcourir 10 700 km pendant leur migration annuelle.
Les mouvements migratoires intéressent aussi depuis longtemps les biologistes de la vie marine. Le réseau Ocean Tracking Network (OTN), établi à l’Université Dalhousie, tente de jeter un nouvel éclairage sur le sujet. Il a ainsi déployé dans les cinq océans du monde plus de 2 000 moniteurs et récepteurs acoustiques de fabrication canadienne afin de suivre les déplacements de 130 espèces aquatiques importantes sur les plans commerciaux, écologiques et culturels.
Les sujets portent l’une ou l’autre des deux variétés d’étiquettes utilisées : des étiquettes acoustiques, qui envoient des signaux sonores à des récepteurs installés sur des bouées ou des structures fixes, et des étiquettes satellites à déploiement suivies depuis l’espace. Selon Fred Whoriskey, directeur général du réseau OTN, « ces étiquettes électroniques sont les outils les plus puissants dont nous disposons. Les plus petites ont la taille de la moitié de l’ongle de mon majeur et ont une durée de vie de six à 12 mois. Les plus grosses sont de la taille de mon majeur et ont une durée de vie de 10 à 20 ans. Elles nous permettent de suivre un animal toute sa vie durant. »
Et les scientifiques s’attendent à voir encore plus d’avancées aussi remarquables, comme des étiquettes alimentées par des piles rechargeables, ou pouvant être rechargées directement par les mouvements physiques ou la chaleur corporelle des animaux. On tente actuellement de fabriquer des drones alimentés par pile solaire, et de faire en sorte qu’ils puissent se percher sur une branche ou utiliser les colonnes d’air chaud pour planer comme un aigle.
Ironiquement, la technologie, malgré sa froideur stérile auparavant opposée à la faune dans une relation de dominance, permet maintenant d’étudier les animaux de façon intime et révélatrice. Grâce à la science en pleine expansion, les animaux deviennent en quelque sorte des océanographes qui, par l’intermédiaire de leurs sens, révèlent leur univers au grand jour, sans que le cours de leur vie en soit particulièrement perturbé.
Ces travaux sont émotionnellement gratifiants pour les scientifiques. Cet automne, une équipe de l’unité de recherche sur les mammifères marins de l’Université de la Colombie-Britannique a passé un mois en mer pour filmer les orques résidentes du Nord et du Sud à partir du ciel, à l’aide de drones, mais aussi de caméras autocollantes sous-marines apposées sur leur corps. Grâce à ces appareils, l’équipe a pu enregistrer ce que les orques voient et entendent, les sons qu’elles produisent, ainsi que leurs déplacements tridimensionnels, la profondeur de leur plongée et leurs comportements alimentaires.
« Cette technologie nous permet de combiner toutes les sources de données pour avoir un portrait global de ce qui se passe sous l’eau. C’est du jamais vu, et c’est plutôt emballant », se réjouit Sarah Fortune, biologiste postdoctorale de la vie marine et conceptrice de l’étude.
Postes vedettes
- Chaire de recherche du Canada, niveau 2 en génie électrique (Professeur(e))Polytechnique Québec
- Medécine- Professeur.e et coordonnateur.rice du programme en santé mentaleUniversité de l’Ontario Français
- Droit - Professeur(e) remplaçant(e) (droit privé)Université d'Ottawa
- Littératures - Professeur(e) (Littérature(s) d'expression française)Université de Moncton
- Médecine - Professeur(e) adjoint(e) (communication en sciences de la santé)Université d'Ottawa
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