Un rapport confirme le retard canadien en matière d’innovation

La portion du PIB consacrée à la recherche-développement y est décrite comme étant en déclin depuis 2001, principalement en raison du manque d’investissement des sociétés.

12 avril 2018
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Le Canada a su maintenir son rang dans le domaine de la recherche et de l’éducation, mais accuse un retard croissant en matière de recherche-développement (R-D) industrielle, d’innovation et de création de richesse. C’est ce que révèle un nouveau rapport sur la situation des sciences et de la technologie au pays, produit par un groupe d’experts mandaté par le Conseil des académies canadiennes.

« Le Canada va dans la mauvaise direction par rapport à d’autres pays, déclare Max Blouw, ancien recteur de l’Université Wilfrid Laurier et président du comité ayant produit le rapport. Nous n’investissons pas autant et nous ne réagissons pas aussi rapidement qu’eux. »

Selon le rapport, la portion du PIB consacrée à la R-D est en déclin constant depuis 2001, principalement en raison du manque d’investissement des sociétés, lui aussi en recul. Le Canada accuse d’ailleurs un retard important à ce chapitre sur la moyenne des pays de l’OCDE. Il faudrait plus que doubler les dépenses en R-D pour rejoindre le peloton de tête.

La recherche scientifique demeure une force du Canada. La population canadienne détient le plus haut taux de réussite scolaire de l’OCDE, bien que le nombre de titulaires de doctorat par habitant soit inférieur à celui d’autres pays. De 2009 à 2014, le Canada a produit 3,8 pour cent des textes scientifiques publiés dans le monde. Ce résultat lui vaut le neuvième rang mondial, en recul de deux places depuis la précédente édition de ce rapport rendue publique en 2012, l’Inde et l’Italie l’ayant surpassé. Toutefois, selon le nombre de publications par habitant, le Canada se tire un peu mieux d’affaire avec son cinquième rang mondial (veuillez consulter le graphique ci-dessous). Le Canada a aussi conservé son rang en ce qui concerne les retombées de la recherche. Il occupe toujours la sixième place pour la moyenne des citations relatives et la quatrième selon le sondage sur la réputation dans le domaine de la recherche.

Placez votre pointeur sur le graphique pour afficher les données détaillées.

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Source : Conseil des académies canadiennes, Rivaliser dans une économie mondiale axée sur l’innovation : L’état de la R-D au Canada (données en annexe).

Le Canada tire son épingle du jeu dans plusieurs secteurs, dont la médecine clinique, la santé publique, les sciences environnementales et les sciences humaines (la psychologie et la philosophie en particulier). Le rapport indique toutefois que la production de recherche est inférieure aux attentes dans les domaines des sciences naturelles et du génie, d’où émanent les « technologies habilitantes et stratégiques », qui sont des moteurs de l’économie actuelle. Même dans les domaines où ses chercheurs ont joué un rôle majeur dans les débuts de la recherche, comme l’intelligence artificielle et la médecine régénérative, le Canada a perdu du terrain.

« Nos forces en recherche sont moins adaptées à l’activité et aux promesses économiques modernes que nous l’aurions souhaité, regrette M. Blouw. Nous n’avons pas pris le virage aussi bien que d’autres pays. »

Pour sa part, Catherine Beaudry, membre du groupe d’experts et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en création, développement et commercialisation de l’innovation à Polytechnique Montréal, soutient que notre expertise en sciences sociales est un véritable atout pour le pays. Selon elle, « l’incidence sociale des nouveaux domaines en développement, comme l’intelligence artificielle et la médecine régénérative, doit être étudiée. »

Comme pour les sciences fondamentales, l’industrie canadienne fait meilleure figure dans les secteurs moins axés sur la R-D. « Notre tissu industriel compte beaucoup d’entreprises faiblement ou moyennement technologiques », précise Mme Beaudry. Au Canada, les secteurs hautement technologiques, comme l’aérospatiale et la recherche pharmaceutique, comptent pour environ la moitié des dépenses de l’industrie en R-D, comparativement à 80 pour cent en moyenne au sein du G7.

Même les secteurs faiblement technologiques des ressources naturelles, de qui dépendent traditionnellement la majeure partie des activités de R-D au Canada, sont en déclin. Les secteurs pétrolier et gazier « ont connu une baisse si marquée que nous ne les considérons même plus comme des points forts », souligne M. Blouw.

Le problème ne réside pas dans le manque d’innovation de la population et des entreprises canadiennes. Le milieu universitaire entretient d’étroites relations avec les entreprises, le système d’éducation produit un grand nombre de diplômés hautement qualifiés en sciences, en technologies, en génie et en mathématiques, le capital de risque est facilement accessible et les jeunes pousses ont le vent dans les voiles dans de multiples régions du pays. « Des rapports préliminaires semblaient indiquer que le Canada avait des lacunes en innovation, rappelle M. Blouw. Mais c’est faux. Nous avons une foule de bonnes idées et comptons beaucoup d’entreprises en démarrage. C’est sur le plan de la création de la richesse que le bât blesse. »

Selon lui, les raisons de ce phénomène sont complexes, mais le manque d’expérience et de compétences administratives au sein des entreprises en croissance et le fait que les crédits d’impôt de R-D soient conçus principalement pour les petites entreprises posent particulièrement problème. De plus, le fort taux d’acquisition des petites entreprises canadiennes par des intérêts étrangers signifie que la richesse créée par les inventions d’ici quitte souvent le pays. Ainsi, selon les conclusions du rapport, le Canada est un meilleur endroit pour fonder une entreprise de technologie que pour la faire croître.

M. Blouw accueille comme une bonne nouvelle la hausse marquée des dépenses en sciences fondamentales annoncée dans le budget fédéral de cette année, mais il ne croit pas que cela réglera les problèmes sous-jacents au déficit de l’innovation au Canada. « Nous avons la main-d’œuvre et l’infrastructure nécessaires. C’est au sous-investissement de l’industrie dans la R-D que nous devons maintenant nous attaquer. »

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