Conseils pour faciliter le mentorat d’étudiants autochtones aux cycles supérieurs

Des conférenciers livrent quelques pistes de réflexion afin de créer un milieu favorable aux activités savantes des étudiants autochtones.

30 mars 2018
Business discussion

Les universités cherchent à accroître le nombre de professeurs et d’étudiants autochtones aux cycles supérieurs. Toutefois, elles confient à ces nouvelles recrues la responsabilité de s’adapter au milieu universitaire, ce qui peut représenter une aventure périlleuse. Les universités devraient plutôt se renseigner sur la réalité des Autochtones et apporter les changements requis, ont affirmé des conférenciers au sommet sur le mentorat des étudiants autochtones aux cycles supérieurs, organisé en février par l’Indigenous Education Network à l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario (IEPO) de l’Université de Toronto.

Le mentorat pourrait s’avérer inefficace si l’étudiant autochtone est jumelé à un superviseur qui se réalise pleinement dans les modes de fonctionnement actuels en recherche, affirme Eve Tuck, professeure agrégée titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les méthodologies de la recherche autochtone exécutée auprès des jeunes et des communautés, à l’IEPO, qui figure parmi les organisateurs du sommet tenu à guichet fermé.

Pour créer un milieu accueillant et favorable aux activités savantes des étudiants autochtones aux cycles supérieurs, les universités doivent examiner le contexte culturel et les besoins de ces étudiants, ajoute Mme Tuck. Elles doivent aussi mener cette réflexion sur leurs propres campus.

Voici des conseils formulés par les conférenciers du sommet :

  • Explorez l’expertise que votre université possède peut-être déjà, et accordez-y de la valeur. Les relations de mentorat fructueuses et l’épanouissement universitaire des Autochtones font partie de ce savoir-faire. Accordez de l’importance à ces connaissances. Ne demandez donc pas à ceux qui les possèdent de vous les livrer entre deux échéances.
  • Mettez en valeur l’apport des étudiants autochtones à l’université. Soulignez par exemple le savoir traditionnel, les récits de famille, la culture et les responsabilités communautaires et familiales qui transparaissent dans leurs activités professionnelles. Offrez-leur des lieux de rencontre privés et publics et permettez-leur d’échanger avec les membres de leur famille et de leur collectivité.
  • Attardez-vous à leurs qualités humaines et mettez en valeur leurs travaux de recherche. Mangez en leur compagnie, riez avec eux et laissez-leur le temps nécessaire pour qu’ils puissent se dépasser. « Le mentorat prend appui sur les liens personnels établis avec les étudiants », affirme Stephanie Waterman, professeure agrégée à l’IEPO, membre du clan de la tortue de la Nation Onondaga, du Nord de l’État de New York. Faites l’éloge de leurs travaux et encouragez les autres à les citer, ajoute-t-elle.
  • Rappelez-vous que les étudiants autochtones aux cycles supérieurs font souvent œuvre de pionniers. Ils peuvent être les premiers de leur famille ou de leur collectivité à faire des études supérieures. Ce sont peut-être aussi les seuls étudiants autochtones de leur programme. Souvent, ils n’ont pas eu de modèle et ont besoin d’aide pour se débrouiller dans le système universitaire et profiter des possibilités de financement.
  • Faites vos recherches. Il n’est pas facile de bien comprendre le contexte culturel des étudiants autochtones. Ces derniers ne devraient pas avoir à éduquer leurs superviseurs ni servir de porte-parole dans la mise en œuvre de projets de recherche avec les collectivités autochtones. « N’attendez pas des étudiants autochtones qu’ils vous expliquent toutes les facettes de leur réalité ou vous présentent automatiquement les histoires et les enseignements de leurs collectivités », indique Marie Laing, étudiante à la maîtrise à l’IEPO, Mohawk des Six nations de la rivière Grand.
  • Le contenu présenté en classe et utilisé en recherche peut être directement lié à l’expérience des étudiants autochtones. Ces situations provoquent parfois des émotions difficiles et doivent être traitées avec une attention toute particulière. « C’est ce qui m’est arrivé », déclare Kayla Webber, étudiante à la maîtrise en éducation, à l’IEPO, de descendance micmaque. Laissez les étudiants autochtones raconter librement leurs expériences difficiles. Ne les poussez pas à le faire.

Le modèle de l’« étoile montante » ne fonctionne pas. Le parcours de l’étudiant ambitieux et indépendant ne cadre aucunement avec les valeurs autochtones, qui prônent la réussite collective grâce à l’apport et au soutien de nombreuses personnes, dont la famille et la collectivité, souligne la conférencière métisse Zoe Todd, professeure adjointe en anthropologie à l’Université Carleton. La plupart des universitaires autochtones cherchent à contribuer positivement à leur collectivité et démontrent une grande humilité, selon Robert Innes, Cri des plaines membre de la Première Nation de Cowessess, qui dirige le programme d’études autochtones à l’Université de la Saskatchewan. Ils ne se considèrent pas comme des « experts ». Ils sont d’avis qu’ils ont simplement saisi l’occasion qui se présentait et souhaitent maintenant faire profiter les autres de leurs connaissances.

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