Rendre les conversations difficiles plus agréables

Comment soulever et résoudre les problèmes complexes en milieu universitaire.

Two people disagree on which direction to take

Même quand tout va pour le mieux, la plupart d’entre nous envisagent avec appréhension les conversations difficiles. En ces temps de pandémie de COVID-19 marqués par les échanges en ligne, le stress et le télétravail, le fait d’éviter tout bonnement ces conversations peut sembler la meilleure option. Mais ce serait une erreur.

L’amélioration de la culture d’un milieu de travail exige la tenue régulière de conversations difficiles. Pourtant, environ les deux tiers des gens sont très anxieux à l’idée d’avoir de telles conversations. Comme personne n’aime être méchant, la plupart de ces conversations, pourtant souhaitables, n’ont donc tout simplement pas lieu.

Un certain nombre de stratégies tirées de diverses études peuvent nous aider à aborder les conversations difficiles en milieu de travail avec plus de sérénité. Voici quelques conseils pour que vos prochaines conversations difficiles se déroulent bien.

1. Ne confondez pas désaccord et conflit

Nous sommes tous enclins à confondre désaccord et conflit.

Les comportements conflictuels vont de la tenue de ragots méprisants à la formulation de critiques hostiles ou agressives, en passant par l’agressivité passive et le fait de se retrancher dans le silence. Dans le milieu universitaire, les réactions de ce type découlent souvent de désaccords relativement mineurs ou purement intellectuels, mais sont incompatibles avec le respect qui doit prévaloir en matière d’échanges.

En abordant une conversation difficile, demandez-vous si votre attitude s’apparente à un comportement conflictuel. Tentez de considérer les différences de points de vue comme naturelles et saines dans un milieu de travail diversifié, ouvert et inclusif. Même si vos interlocuteurs adoptent une attitude conflictuelle, il n’en tient qu’à vous de percevoir et de composer avec les conversations difficiles comme étant l’expression de désaccords, non de conflits.

 2. Transformez les conversations difficiles en occasions d’apprendre

 Sans surprise, lorsque nous abordons une conversation difficile, nous nous concentrons souvent sur ce que nous voulons dire. Notre réflexe immédiat est de considérer que nous comprenons le problème alors que les autres ne le comprennent pas, que ce sont « eux » le problème, et que nous devons les aider à en prendre conscience.

L’appréhension et le stress liés à une conversation difficile ne sont pas suscités par la conversation en soi, mais par notre perception de cette conversation et de nos propres réactions. Nous interprétons les situations et prêtons des intentions à autrui, mais sans avoir tous les éléments en main. La démarche élaborée par Doug Stone et ses collègues à cet égard (Difficult Conversations approach) consiste à considérer les conversations difficiles comme des occasions d’aborder ce qui s’est passé, ce qui aurait dû se passer, et les choses ou les personnes qui ont contribué à la tournure des événements. Percevez ces conversations comme des occasions d’apprendre plutôt que d’imposer votre vérité.

3. Comprenez vos sentiments sans les nier

Vous n’avez pas à nier les sentiments que suscite en vous une conversation difficile. Ils sont le signe que l’objet de la conversation compte pour vous, qu’il est lié à votre identité, à ce qui vous tient à cœur, à vos valeurs fondamentales. Selon M. Stone et ses collègues, ces sentiments sont l’essence même des conversations difficiles, ils sont véritablement au cœur de celles-ci.

Plutôt que de nier vos sentiments, tentez de mieux les cerner, avant comme pendant la conversation. Dans son récent ouvrage intitulé Don’t Label Me, la militante Irshad Manji nous demande d’éviter de poser des étiquettes aux participants à une conversation difficile : homme blanc en colère, néolibéral vendu, personne difficile, etc. Catégoriser ainsi les interlocuteurs ne fait qu’amplifier nos émotions déjà vives et ne nous aide guère à mieux cerner les autres ou nos propres sentiments. Tentez plutôt de comprendre pourquoi l’objet de la conversation, les participants à celle-ci ou les étiquettes que vous leur accolez éveillent en vous des sentiments si forts. Demandez-vous aussi comment vous souhaitez vous sentir une fois la conversation terminée, et comment vous conduire pour préserver votre intégrité.

 4. Restez curieux

Mme Manji soutient que rien ne vaut la curiosité pour cerner les autres, leur perception de la situation et ce qui importe pour eux, même s’il vous semble plus facile de leur apposer des étiquettes et de vous en tenir à vos hypothèses. Mais si la conversation vise à évaluer une situation, à s’y attaquer et même à l’améliorer, il vous faut savoir échanger, poser les bonnes questions et écouter.

Le fait d’être attentif à vos sentiments et d’éviter de catégoriser les gens vous aidera à mieux écouter. Pour bien écouter quelqu’un, vous devez vous concentrer sur lui, sur ce qu’il dit et sur la manière dont il le dit, y compris sur ses motivations tacites et ses comportements non verbaux. Placez la personne au centre de votre esprit, soyez présents, et méfiez-vous de vos préjugés, en particulier des reproches et des accusations. Posez des questions pour savoir comment les autres vous perçoivent ainsi que votre point de vue et la situation.

5. Concentrez-vous sur votre contribution

 En définitive, nous ne pouvons contrôler que nous-mêmes, notre perception des situations et ce que nous choisissons de faire. Plutôt que de vous concentrer sur ce que les autres devraient faire, demandez-vous en quoi vous avez contribué au problème et ce que vous ferez différemment la prochaine fois. De plus, encouragez si possible les autres à faire de même en leur manifestant soutien et empathie.

Bailey Sousa et Lois Harder sont respectivement directrice et principale du Collège sur le leadership Peter Lougheed de l’Université de l’Alberta. Alexander Clark est vice-recteur adjoint et professeur à l’Université de l’Alberta.

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