Budget fédéral : signal positif pour la recherche, mais des questions demeurent
Les leaders universitaires saluent le maintien des investissements en recherche et la stratégie d’attraction de talents, tout en exprimant des inquiétudes face à la réduction des permis d’études et aux zones grises du budget.
Après l’annonce d’une réduction majeure des permis d’études internationaux et d’un plan d’investissement visant à attirer des chercheuses et chercheurs internationaux, les réactions du milieu universitaire ne se sont pas fait attendre.
Pour le doyen de la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal, Frédéric Bouchard, le budget fédéral 2025 envoie un message plutôt positif pour le milieu de la recherche, même si plusieurs zones grises demeurent. « c’est un signal encourageant de voir que les trois conseils subventionnaires : le CRSNG, le CRSH et les IRSC semblent relativement épargnés par les compressions que subissent d’autres ministères et agences. Cela montre que la recherche demeure une priorité pour le gouvernement », affirme-t-il.
Autre élément à surveiller : la création d’une structure nationale chargée de mieux coordonner le financement de la recherche. « C’est une recommandation que nous avions formulée dans notre rapport. Les travaux sont déjà amorcés au Parlement, mais la forme exacte que prendra cette organisation reste à préciser », affirme le doyen.
L’une des principales mesures annoncées concerne le recrutement de chercheuses et chercheurs internationaux, avec plus de 1,7 G $ sur plusieurs années pour financer des chaires de recherche, de l’infrastructure et des bourses. « Ce qui est intéressant, c’est que ces fonds sont rattachés aux conseils subventionnaires, ce qui assure une certaine cohérence dans le financement », souligne M. Bouchard. Toutefois, ce dernier s’interroge sur la nature exacte de ces sommes : « s’agit-il de nouveaux investissements ou d’une réorientation de réinvestissements déjà prévus dans le budget précédent ? »
Concernant les restrictions imposées aux permis d’études pour les étudiantes et étudiants internationaux, Frédéric Bouchard estime qu’il faudra assurément revoir la politique. « Si on veut maintenir des laboratoires de calibre mondial, il faut pouvoir recruter des talents partout sur la planète. Ce ne sont pas les étudiants de maîtrise et de doctorat qui exercent une pression sur le marché locatif. La stratégie de talent annoncée dans le budget devra s’accompagner d’une plus grande souplesse sur ce plan. »
Il se montre également attentif à la portée réelle du soutien à l’infrastructure scientifique. Bien que la Fondation canadienne pour l’innovation reçoive un financement additionnel, il prévient que le virage du budget se veut « très technologique » mettant l’accent sur l’intelligence artificielle et les matériaux critiques. « Il ne faut pas oublier que l’innovation repose aussi sur les sciences humaines et sociales. Les transformations du travail et de l’IA ne sont pas que des enjeux technologiques, ce sont des défis humains », rappelle-t-il.
Enfin, M. Bouchard souligne que les universités demeurent confrontées à des pressions financières provinciales qui limitent leur marge de manœuvre. « Le budget fédéral ne peut pas tout régler. Le financement des universités dépend aussi des provinces, qui doivent pouvoir contribuer pour que les établissements profitent pleinement des nouvelles mesures », explique-t-il.
Robert Asselin, chef de la direction de U15 Canada, a accueilli favorablement le nouveau budget fédéral. « Dans un contexte où plusieurs ministères et agences doivent réduire leurs dépenses, il est encourageant de constater que les investissements en recherche ont été préservés. De plus, un montant de 1,7 milliard est consacré à l’attraction des talents, ce qui est très positif pour l’avenir, particulièrement au niveau fondamental, et s’inscrit dans la vision du gouvernement pour le développement scientifique et technologique du pays. »
Le responsable affirme que U15 travaille déjà étroitement avec les autorités gouvernementales, notamment avec les conseils subventionnaires, pour définir les meilleurs mécanismes afin d’attirer rapidement de nouveaux talents tout en respectant les règles administratives. « C’est un processus qui s’étalera sur plusieurs années, mais nous avançons bien. »
La diminution drastique des permis d’études l’inquiète toutefois. « Depuis longtemps, nous soulignons le rôle crucial des étudiants internationaux dans le système universitaire. Nous devrons attendre plus de contexte pour évaluer les effets concrets, mais c’est un point à suivre de près. »
Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec, se dit encouragé par l’investissement massif pour attirer des talents. « Qu’il s’agisse de jeunes chercheurs ou d’experts chevronnés, c’est un signal positif pour l’avenir de la recherche fondamentale au Canada.»
Cependant, il met en garde contre la baisse prévue du nombre de permis d’études internationaux, évoquée à hauteur de presque 49 %. « Une telle diminution pourrait représenter près de 100 000 étudiants en moins chaque année, ce qui risque de limiter la diversité et la capacité des laboratoires à recruter des chercheurs qualifiés, notamment dans des secteurs de pointe comme l’intelligence artificielle. »
Autre point sensible selon lui : le financement des conseils subventionnaires, qui subissent une coupe d’environ 2 %. « Même si cette réduction est moins importante que pour d’autres ministères, elle reste significative, car beaucoup d’équipements scientifiques sont importés. Sans ressources suffisantes, il sera difficile de maximiser l’effet de ces nouveaux talents », explique M. Quirion.
Il affirme que le Québec se prépare à accueillir les chercheuses et chercheurs internationaux grâce à des ententes avec le ministère de l’Immigration qui incluent des voies rapides pour faciliter l’intégration des nouveaux arrivants.
Enfin, le budget prévoit des investissements ciblés dans l’intelligence artificielle, notamment pour les capacités de calcul, avec 150 millions supplémentaires en plus des 800 millions déjà annoncés. « Ces sommes sont un pas dans la bonne direction mais dans le secteur privé, notamment aux États-Unis et en Chine, des milliards de dollars sont investis, ce qui rend la compétition internationale particulièrement intense. »
Postes vedettes
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