Surmonter la précarité : le quotidien des titulaires de postes contractuels

À quoi les membres occasionnels du corps professoral peuvent-ils s’attendre?

08 janvier 2020
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Les postes contractuels sont la nouvelle norme. Selon la discipline et l’établissement, le nombre d’heures et les avantages sociaux liés à ces postes varient considérablement. Il est toutefois possible de dégager une tendance globale en ce qui concerne ces emplois atypiques. Le texte ci-dessous, fruit de ma réflexion sur mon expérience de professeure contractuelle au Canada et aux États-Unis, résume les conditions d’emploi auxquelles on peut s’attendre.

Qu’entend-on par « poste contractuel »?

Le terme « contractuel » peut désigner des postes à temps partiel ou à temps plein, d’un trimestre ou pluriannuels, d’enseignement ou de recherche. Les appellations de ces postes sont multiples. En 2018-2019, par exemple, plus de 25 titres différents (en anglais et en français) ont été utilisés dans ma discipline en Amérique du Nord pour désigner des postes contractuels. Toutefois, leur dénominateur commun est la précarité. Les postes contractuels (surtout ceux à temps partiel) n’offrent aucune sécurité et comportent peu, voire aucun, des avantages sociaux inhérents aux postes permanents.

Le nombre de postes contractuels dans les universités est en hausse. Selon l’étude Contract U financée par le Centre canadien de politiques alternatives, 54 pour cent des membres du corps professoral occupent un poste contractuel et 42 pour cent, un poste à temps partiel. En conséquence, ces employés doivent cumuler plusieurs contrats, parfois dans plusieurs établissements, pour gagner convenablement leur vie. L’élément le plus important à retenir, si vous occupez un poste contractuel au sein du corps professoral, est de faire passer votre bien-être avant tout.

Analyse de l’offre d’emploi

Examinez attentivement les conditions d’une offre d’emploi contractuel. Quelles sont les exigences d’enseignement (charge de travail, préparation, correction des travaux, etc.)? Quelle est la rémunération – pouvez-vous en vivre? Vous permet-elle d’économiser un peu ou de rembourser votre prêt d’études? Quelles sont les exigences sur le plan du temps – devrez-vous consacrer des heures dans les travaux de service? Vous garantit-on un soutien pour vos travaux de recherche? En cas de doute, informez-vous; il est préférable d’obtenir des précisions sur les conditions à cette étape du processus et par écrit.

N’oubliez pas que vous pouvez toujours refuser. Si les conditions vous semblent abusives, elles le sont probablement. Je vous suggère de définir vos conditions minimales avant de commencer à recevoir des offres d’emploi.

Vacances d’été

Les vacances d’été permettent de terminer l’écriture d’un ouvrage et de planifier vos travaux de recherche de manière à y consacrer moins de temps pendant le trimestre. Prenez une décision stratégique : qu’est-ce qui conférera le plus de valeur à votre curriculum vitæ? À quoi les comités d’embauche accorderont-ils de l’importance? Préparez une liste de publications que vous pourrez afficher dans vos documents d’emploi.

Lorsque vous planifierez vos cours, vous ferez sans doute du travail non rémunéré, car de nombreux postes contractuels ne commencent qu’au début de septembre. Lorsque vous n’occupez pas d’emploi pendant l’été ou un trimestre, vous pouvez faire une demande d’assurance-emploi; c’est d’ailleurs ce que vous devriez faire si vous avez payé vos cotisations toute l’année. Assurez-vous de vous familiariser à l’avance avec l’assurance-emploi.

Trimestres d’automne et d’hiver

En cours de trimestre, n’oubliez pas de vous accorder du temps. Afin d’éviter que les courriels et les préparatifs de cours s’accumulent, réservez-vous du temps : déterminez le temps minimal nécessaire pour préparer vos cours, ajoutez à cela une période tampon et du temps pour les activités de votre département, puis réservez le reste de votre journée aux formulaires de demande et à la rédaction. Ne renoncez jamais à ce temps. Essayez de réserver un moment pour répondre à vos courriels et respectez-le. De plus, soyez ferme pour ce qui est des heures où vous travaillez et celles où vous ne travaillez pas; faites de votre mieux pour respecter votre horaire et n’en dérogez qu’exceptionnellement.

Il se peut que vos étudiants vous demandent quelle matière vous enseignerez au prochain trimestre ou l’année suivante. Ne soyez pas mal à l’aise, parlez franchement à vos étudiants et expliquez-leur que bon nombre des chargés de cours de leur université occupent un poste temporaire. Les étudiants jouent un rôle important dans la revendication de meilleures conditions de travail pour les professeurs contractuels, en partie parce que la précarité de la main-d’œuvre enseignante les touche de très près.

Et maintenant?

Les postes contractuels ne risquent pas de disparaître à court terme. Beaucoup de correctifs doivent y être apportés, et les universités doivent améliorer leurs relations avec leur personnel contractuel. Vous, candidat ou titulaire d’un poste contractuel, avez peut-être l’impression de ne pas avoir votre mot à dire, mais c’est faux. Durant une entrevue, vous évaluez l’établissement au même titre qu’il vous évalue, et vous avez la possibilité d’accepter ou de refuser son offre. Refuser un emploi est difficile et s’en absenter l’est encore plus. Mais votre pouvoir réside dans votre capacité d’évoluer dans un cadre et de le quitter au moment où vous le décidez.

Jessica Romney est professeure adjointe en lettres classiques au Département des sciences humaines de l’Université MacEwan. Elle est également directrice générale de la Maple League of Universities.

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